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Archive de l’auteur admin

Pause méditation du 25 avril 2022

Une méditation sélectionnée par notre frère Raphaël.

Le dit de Cléophas d’Emmaüs

Marchions fourbus
vers Emmaüs,
le profil bas
à reculons
avec nos pas
de feuilles mortes.

Marchions si las
clopin-clopant.
Le ciel aussi
boitait si bas
sans horizon.

Nous rejoignit
un inconnu
nous questionnant
sur nos tourments.

Le soir tombait
mais l’étranger
trouvait des mots
comme des lampes.

Des mots si simples
et si immenses,
c’étaient des portes
à deux battants
qui nous ouvraient
les Écritures.

Or, parvenus
au carrefour,
à la pliure
du grand livre,
sans un détour
il fit semblant
de s’éloigner
nous laissant seuls
abasourdis
avec nos cœurs
meurtris, brûlants.

Où irions-nous
si tu t’en vas ?
Reste avec nous !
Vois : l’ombre
gagne
sur nos jours.
Reste avec nous
quand tout
s’éloigne.

Sur le chemin
de la déroute
tu as des mots
qui nous éclairent
et qui dissipent
notre doute.
Voici l’auberge
où nous refaire.
Ta compagnie
nous avoisine ?

A peine entré,
notre invité
passa commande
à la serveuse,
et nous, ses hôtes,
vîmes le Maître
rompre le pain
avec un geste
rayonnant
d’infinitude,
mais reconnu
il disparut
laissant la table
ouverte à tous.

Foi de disciples,
à n’y pas croire !
C’était donc lui
notre Sauveur
et notre ami
encore tout frais
ressuscité
et nous restés
à nos tombeaux !

Gilles Baudry
Demeure le veilleur
éditions Ad Solem, 2013



Arcabas
Les disciples d’Emmaüs

Dimanche de Pâques 2022

Tout au long de ce Carême 2022 et jusqu’à Pâques, retrouvez les méditations proposées par notre sœur Françoise.

Qu’éclate de partout la joie du monde

Le premier jour de la semaine, Marie Madeleine se rend au tombeau de grand matin ; c’était encore les ténèbres. Jean 20, 1

Le premier jour de la semaine : Jour de la résurrection, nous le savons désormais.
Pour Marie Madeleine, c’est encore les ténèbres.

Pour tous ceux en Ukraine, et ailleurs, qui subissent les guerres meurtrières, la violence des conflits, c’est encore les ténèbres.

Pour tous ceux qui sont victimes d’abus, de drames effroyables, de situations dégradantes, de rejets et de harcèlement, c’est encore les ténèbres.

Pour tous ceux-là et bien d’autres, c’est la nuit, celle qui étreint le cœur et bouleverse les âmes, dans laquelle il reste encore quelques forces, pour ne pas couler, pour ne pas se perdre…

Et c’est pourtant de grand matin. Marie Madeleine se met en marche après une nuit de tristesse et d’effroi. Comment aurait-elle pu dormir quand son Seigneur repose dans le silence et le froid ! Se mettre en marche avec au fond de soi quelque chose qui pousse à avancer, même si c’est de nuit… Se mettre en marche, sortir de nuit, sans autre lumière que celle qui luit dans mon cœur, comme l’écrivit saint Jean-de-La-Croix.

Dans ce matin où aucune espérance ne semble plus possible, le tombeau est ouvert !

Dans ce matin, qui se pare bientôt des douces lueurs de l’aurore, courir, aller chercher Pierre et Jean : la béance du tombeau est trop grande pour oser s’y engouffrer seule !

Dans ce grand matin, le soleil de Pâques vient éclairer le lieu de l’échec, de l’abandon, de l’effroi et de la mort.

En ce grand matin, l’incroyable se manifeste. Le Seigneur est vivant ! Libéré ! Les bandelettes, liens de l’angoisse et des forces de la mort n’ont pu le maintenir emprisonné !

Voir et croire !

En ce grand matin de Pâques, la lumière se lève dans la nuit, au plus noir de ce lieu où tout espoir disparait. Oui, nous savons désormais ! C’est notre espérance inaliénable.

En ce grand matin de Pâques, avec le Christ, le Ressuscité, Le Vivant, je suis vivante, moi aussi !
Alléluia !

Françoise,
sœur de la Communion Béthanie

Qu’éclate dans le ciel la joie des anges
Qu’éclate de partout la joie du monde…

Voici dans la nuit la victoire
Voici dans la nuit la lumière
Voici la liberté pour tous les fils de Dieu
Ô nuit qui vit la lumière
Ô nuit qui vit le Seigneur ressusciter

Exultet de la nuit de Pâques

Vendredi Saint 2022

Tout au long de ce Carême 2022 et jusqu’à Pâques, retrouvez les méditations proposées par notre sœur Françoise.

Et si nous parlions de la Croix ?

D’après Prier 15 jours avec Christian de Chergé, par Christian Salenson

Et si nous parlions de la croix ? me demandait récemment l’un de nos amis soufis.

  • Laquelle ? lui demandai-je. La croix de Jésus évidemment.
  • Mais laquelle ? quand tu regardes une image de Jésus en croix, combien vois-tu de croix ? Il hésitait.
  • Peut être trois… sûrement deux. Il y a celle de devant et celle de derrière.
  • Et quelle est celle qui vient de Dieu ? Celle de devant, disait-il.
  • Et quelle est celle qui vient des hommes ? Celle de derrière.
  • Et quel est le sens de cette croix de devant, de cet homme aux mains étendues ? Quand j’étends les bras, disait-il, c’est pour embrasser, pour aimer.
  • Et l’autre ? C’est l’instrument de l’amour travesti, défiguré, de la haine figeant dans la mort le geste de la vie.

L’ami soufi avait dit : peut-être trois ? Cette troisième croix, n’était-ce pas moi, n’était-ce pas lui, dans cet effort qui nous portait, l’un et l’autre, à nous démarquer de la croix de derrière, celle du mal et du péché, pour adhérer à celle de devant, celle de l’amour vainqueur.
Christian de Chergé

Devant
L’homme a été créé en forme de croix. Aussi l’homme ouvre-t-il les bras. Le jeune enfant se précipite et trouve refuge dans les bras ouverts de son père ou de sa mère. Homme et femme se prennent dans les bras l’un de l’autre. Rien de tel que les bras ouverts pour être à l’image et à la ressemblance du Père ! Dieu a créé l’homme en forme de croix, inscrivant en son corps sa vocation, corps ouvert aux dimensions de l’univers et de l’accueil de l’autre.

Mais la croix de devant est fragile. L’homme a vite fait de se replier. Craintif ou menacé par la peur de perdre son bonheur, l’homme court le risque de refermer les bras.

La croix de devant, c’est l’homme créé bras ouverts en acceptant de ne pas posséder ceux qu’il aime.

Derrière
La croix de derrière est une invention des hommes. Elle consiste à prendre la croix de devant et à l’enchaîner brutalement au bois. Jésus n’était qu’amour et liberté, accueillant bras ouverts ceux qu’il rencontrait. Il a été cloué au bois par les chefs religieux et le pouvoir politique.

Le baiser de trahison, tel une lance, a ouvert son côté. Les reniements de ses proches ont tressé la couronne d’épines. La croix de derrière fut celle de l’amour trahi.

Chacun fait l’expérience de la croix de derrière. Il est des hommes qui vivent des drames inqualifiables, victimes innocentes, corps torturés, méprisés, tués…

De manière moins criante, chacun peut être crucifié à l’endroit où il aime.

Si l’homme qui ouvre les bras prend la ressemblance de Dieu, Dieu, en son fils crucifié prend la ressemblance des hommes, de ceux qui ont pris le risque de l’amour et qui en souffrent.

Cette deuxième croix ne sauve pas ! Point n’est besoin de la justifier, et par là même de blasphémer ! Elle est la souffrance que le monde sans Dieu impose à Dieu disait le théologien Dietrich Bonhoeffer, mort en camp de concentration.

Les crucifix de la période moderne présentent des Christ tourmentés. Ils expriment la souffrance bien réelle de notre humanité. Ils risquent cependant de voiler la troisième croix. Les Christ romans n’étaient pas défigurés, offrant au contraire un visage serein, rayonnant la paix. Ils nous initient à un autre aspect de la croix, celle entrevue par l’ami musulman : celle où la souffrance y est déjà transfigurée par l’amour.

Peut-être trois…
Dans la troisième croix s’accomplit le salut. En quoi consiste cette troisième croix ? Elle consiste à ouvrir les bras ou à réapprendre à ouvrir les bras, précisément là où la vie nous blesse. La tendance spontanée consiste à se refermer, à se replier sur soi, sur sa solitude ou sa souffrance. C’est bien naturel et compréhensible ! Le risque est grand de s’aigrir, de se dessécher, de fuir… Pourtant, un autre chemin est possible, ouvert par la croix du Christ.

Chemin de croix
Alors commence pour chacun un chemin de croix où passant de la croix de derrière, celle de la souffrance infligée, à la croix de devant, l’amour encore offert, il va apprendre encore et toujours à dénouer les bras…

La troisième croix ressemble à s’y méprendre à la croix de devant. Apparemment rien n’a changé ! La personne est à nouveau capable d’ouvrir les bras, sauf qu’elle les ouvre en traversant la blessure. Souffrance transfigurée… chemin de résurrection et de vie nouvelle !

Christian Salenson

Frères et sœur nous savons bien que ce passage de l’une à l’autre croix, c’est bien là notre chemin de croix et aussi notre chemin de gloire, car c’est par là que Jésus nous élève, avec lui, vers le Père qui nous attend tous, bras ouverts.
Christian de Chergé

Dimanche des Rameaux 2022

Tout au long de ce Carême 2022 et jusqu’à Pâques, retrouvez les méditations proposées par notre sœur Françoise.

Ton royaume s’ébauche à l’ombre de la croix
Luc 19, 37-40

Toute la foule des disciples, remplie de joie se mit à louer Dieu à pleine voix pour tous les miracles qu’ils avaient vus, et ils disaient : Béni soit celui qui vient, le Roi, au nom du Seigneur. Paix dans le ciel et gloire au plus haut des cieux !

Maître, réprimande tes disciples ! Mais il prit la parole en disant : Je vous le dis : si eux se taisent, les pierres crieront.

C’est un temps de joie pour les disciples, Jésus entre à Jérusalem, assis sur un ânon. Ils connaissent le symbole messianique qu’il représente. Jésus est le messie qui vient délivrer de l’oppression. C’est bien le Roi tant attendu !

Ont-ils conscience que cet ânon représente l’humilité et que Jésus ne vient pas en conquérant mais en serviteur ?

Quel paradoxe : Au moment où Il est dit Paix, une tout autre histoire se dessine, faite de lâchetés, de haine, de violences et de mort.

Jésus le sait. Il connaît le livre d’Isaïe : Je ne me suis pas dérobé. J’ai présenté mon dos à ceux qui me frappaient… Je n’ai pas caché ma face devant les outrages et les crachats. Tout comme le psaume 21 : Ils me percent les mains et les pieds, je peux compter tous mes os.

Il prépare ses proches à ce qui va lui arriver, à cet effroyable qui va le mener au plus grand abaissement, au plus grand abandon, par amour, parce qu’il faut se tenir là, au lieu de la souffrance extrême et de la mort, pour tout sauver.

En ce dimanche des Rameaux, le récit de la Passion est lu, en entier. Pour que nous entendions, que nous comprenions ! La louange et la bénédiction ne peuvent faire l’impasse de l’abaissement, et de la mort de la croix !

Nous aurons encore le Vendredi Saint pour pleurer avec les femmes, à ce moment où les pierres se sont tues…pour pleurer sur notre monde !

Mais pour l’heure, cette joie doit être…aussi… Elle est celle de la gratitude. La louange est là, à pleine voix, pour tous les signes de guérison, de libération, de la vie qui gagne sur la mort.

Et lorsque Jésus fracassera son tombeau, il n’y aura désormais plus moyen de faire taire les disciples. Depuis, si nous tous, disciples du Seigneur, nous nous taisons, les pierres crieront !

Françoise,
sœur de la Communion Béthanie

Carême 2022 – 5e dimanche

Tout au long de ce Carême 2022 et jusqu’à Pâques, retrouvez les méditations proposées par notre sœur Françoise.

S’abaisser pour sauver
Jean 8, 1-11

Comment ne pas être saisi de compassion pour cette femme ! Amenée sans ménagement au milieu d’une foule. Mise à l’index par l’accusation d’adultère portée à son encontre ! Sa vie, dont la fin est annoncée par la loi qui la condamne, est suspendue à la réponse d’un homme.

Jésus, appelé Maître par ceux-là mêmes qui ne comprennent pas, n’entendent pas ses paroles de vie, se comporte mystérieusement ! Il s’abaisse et il écrit sur la terre.

Il ne veut pas se tenir face à eux, en position de rabbi… Ne pas les surplomber… Alors, il se fait petit. Il ne les regarde pas, il écrit sur le sol, non par mépris, mais peut-être pour ne pas heurter ces hommes prisonniers de cette sorte de suffisance que procure l’application stricte de la loi.

Il s’abaisse, se faisant humble, dans une attitude qui désamorce la violence.

Attitude de prière, de réflexion… Il entre dans la grande compassion qui le fait rencontrer chacune et chacun à l’endroit de la vérité de sa vie.

Et la vérité de la vie est que personne ne peut se prévaloir de n’avoir jamais péché. Celui qui est sans péché, qu’il soit le premier à lui jeter une pierre.

Jésus se baisse à nouveau, aussitôt. Pour que, scribes et pharisiens, ne se sentent pas jugés, mais convoqués à être vrais avec eux-mêmes.

L’agir de Jésus, qu’il manifeste tout au long des évangiles, est là : pour chacune de ses rencontres, atteindre le cœur de l’être humain à l’endroit de cette vérité qui le rendra libre. Là où souffle l’Esprit ! Car il sait ce que la loi, appliquée comme une sentence, provoque : la désespérance, l’enfermement, la mort, la difficulté d’un retour à une vie bonne, tournée vers Dieu, ce Père plein d’amour à qui rien n’est impossible. Or, le désir du Père est qu’aucun de ceux qu’il a confié à son Fils ne soit perdu !

La femme est restée là, debout, au milieu, saisie ! Jésus se redresse. Il s’adresse à elle : femme.. Elle existe pour lui, même si son nom est inconnu. Elle peut ainsi poser sa propre parole et mesurer la remise en question fondamentale dont ses accusateurs ont fait preuve pour s’en aller, les uns après les autres, et ne pas la condamner !

Oui, il est vraiment Seigneur, celui qui nous dit : Moi non plus je ne te condamne pas. Va… Va vers une vie plus ajustée à ton vrai désir, plus ajustée au désir de Dieu pour toi. C’est un appel à une vie nouvelle et en même temps, à une exigence de vérité avec soi-même. Un appel à avancer sur nos chemins pas toujours très droits sans crainte, ni trouble au visage, une belle invitation à marcher en enfant de lumière.

Françoise,
sœur de la Communion Béthanie

Carême 2022 – 4e dimanche

Tout au long de ce Carême 2022 et jusqu’à Pâques, retrouvez les méditations proposées par notre sœur Françoise.

Se lever et revenir à la vie
Luc 15, 1-3 ; 11-32

En ce temps-là, les publicains et les pécheurs venaient tous à Jésus pour l’écouter. Les pharisiens et les scribes récriminaient contre lui : Cet homme fait bon accueil aux pécheurs, et il mange avec eux !

Alors il entra en lui même et dit… Je me lèverai.

Il fallait bien qu’elles arrivent, ces récriminations ! Nous y voilà… Jésus a une attitude libre qui dérange. Il va devoir faire front au légalisme desséchant.

Écoute et prête l’oreille de ton cœur, nous dit saint Benoît dans sa règle. Il en est ainsi des publicains et des pécheurs qui viennent TOUS à Jésus pour l’écouter !

Les pécheurs prêtent l’oreille de leur cœur et accueillent une parole qui les rejoint au profond de leurs pauvretés, de leurs exclusions, au profond de leur désir. Ils entendent une parole de vie qui les relève. C’est une parole forte et douce à la fois, simple et sans équivoque, comme lorsqu’ils s’émerveillent de la conversion de Zachée : Aujourd’hui le salut est entré dans cette maison.

Jésus est proche et il ne craint pas de manger avec eux.  Et peu importe que cela plaise ou non aux pharisiens et aux scribes, dont il relèvera la dureté de cœur.

C’est pourquoi Jésus leur dit cette parabole : Un homme avait deux fils…

C’est une histoire où il est question de mort et de vie. Une réponse aux pharisiens et aux scribes, que Jésus qualifiera de sépulcres blanchis, c’est tout dire !

Ce père, Père de chacun de nous, se tient jour après jour dans l’espérance du retour de son jeune fils. Où est-il ? Quelles épreuves traverse-t-il ? Il l’a guetté fidèlement pour l’apercevoir de loin ! Lui demande-t-il des comptes ? Lui fait-il reproche d’avoir dilapidé sa fortune ? Il court se jeter à son cou et le couvre de baisers. Magnifique geste d’amour qui ne condamne pas. La miséricorde de Dieu va bien au-delà de toutes les institutions légalistes qui se vivent comme une fin en soi et n’ont d’autres horizons que le péché commis. Bien au-delà de tous les conformismes religieux qui veulent faire tomber et non vivre – Véronique Margron, La douceur inespérée.

Car mon fils que voilà était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu et il est retrouvé.

C’est l’unique raison, la véritable raison du festin. Une si belle manière de partager cette joie incommensurable de voir son enfant revenu de la mort ! Repas de fête et de bénédiction !

Lorsque Jésus mange avec les publicains et les pécheurs, c’est le festin du Royaume qu’il inaugure. Chaque fois que nous prêtons l’oreille de notre cœur à la Parole qui réveille notre désir profond de revenir à la vie, chaque fois que nous entrons en nous même pour nous reconnaître humblement pauvre mais tellement aimé du Père, nous goûtons la joie d’être à nouveau debout.

C’est le sens de l’être au monde de Jésus : révéler la puissance de la résurrection à l’œuvre. Son immense désir est que chacun, chacune, dans l’amour du Père, puisse se tenir debout, en ressuscité. Il le paiera de sa vie mais désormais le péché pas plus que la mort n’auront le dernier mot.

Françoise,
sœur de la Communion Béthanie

Carême 2022 – 3e dimanche

Tout au long de ce Carême 2022 et jusqu’à Pâques, retrouvez les méditations proposées par notre sœur Françoise.

Où il est encore question de fruits !
Luc 13, 1-19

Mais si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de même.
Jésus leur disait encore cette parabole : Un homme avait un figuier planté dans sa vigne. Il vint chercher du fruit sur ce figuier, et n’en trouva pas. Il dit alors à son vigneron : « Voilà trois ans que je viens chercher du fruit sur ce figuier, et je n’en trouve pas. Coupe-le. A quoi bon le laisser épuiser le sol ? » Mais le vigneron lui répondit : « Seigneur, laisse-le encore cette année, le temps que je bêche autour pour y mettre du fumier. Peut-être donnera-t-il du fruit à l’avenir. Sinon, tu le couperas.»

Jésus nous invite à la conversion, de manière radicale ! La vie, en effet, ne nous épargne pas les épreuves, les catastrophes, et ce n’est pas parce que nous serions plus pécheurs, ou plus coupables… Jésus nous lance un appel pressant parce que la vie est fragile.

Mais comment faire ? Comment vivre ce retournement ? Et surtout, avec quelles ressources pour que ce ne soit pas un feu de paille, bien vite éteint ? Bien sûr, nous portons en nous le désir de revenir à Dieu, de tourner le dos une bonne fois pour toutes à des conduites qui blessent, des attitudes qui font mal. Mais voilà, ça ne fonctionne pas ! Comme saint Paul, je peux dire : Je ne fais pas le bien que je voudrais, mais je commets le mal que je ne voudrais pas.

Dans ces moments-là, il se peut que nous nous considérions comme le figuier qui ne donne pas de fruits. Nous nous jugeons et nous nous condamnons. Si seulement nous pouvions purement et simplement couper, éliminer ce qui ne va pas ! Notre regard sur nous-même manque tellement d’amour, de compréhension, de reconnaissance bienveillante de qui nous sommes ! Avec ou sans fruits…

Il n’en est pas de même pour le vigneron. Quel beau regard il a sur ce figuier ! Voici qu’il intercède pour le sauver de la coupe. En parlant au maître de la vigne, c’est à moi-même qu’il s’adresse, ce moi qui regarde bien souvent ma vie, la vie des autres, en maître exigeant.

Que me dit-il, ce vigneron qui n’est autre que le Christ Jésus ? Ce n’est pas à toi de juger de la fécondité de la vie !

Laisse-moi bêcher ta terre, laisse-moi prendre soin de toi…Cette terre n’est pas aussi aride que tu ne le penses, je vais la retourner, ôter les pierres lourdes et acérées, elle va s’alléger, devenir plus souple… Accueille ma présence, accepte ma sollicitude pour toi.

Laisse-moi faire… Laisse-toi faire ! C’est de moi que tu reçois la fécondité de ta vie !

Alors oui, avec le psaume 50, je peux chanter : Détourne ta face de mes fautes… Rends-moi la joie d’être sauvé·e… Seigneur ouvre mes lèvres et ma bouche annoncera ta louange.

Françoise,
sœur de la Communion Béthanie

Carême 2022 – 2e dimanche

Tout au long de ce Carême 2022 et jusqu’à Pâques, retrouvez les méditations proposées par notre sœur Françoise.

Un Carême de ciel ouvert avec saint-Luc
Luc 9, 28b-36

Habituellement, Jésus quitte ses disciples pour prier seul ! Ici Il prend avec lui Pierre, Jean et Jacques et gravit la montagne. Ils seront témoins d’un événement spectaculaire : L’aspect du visage de Jésus devient autre, son vêtement devint d’une blancheur éblouissante. La relation que Jésus vit avec son Père a des conséquences…Cette intimité profonde, cette union de l’un à l’autre transforme, non seulement le visage, mais aussi le vêtement ! Quelque chose de divin se passe… L’invisible devient visible !

Pour nos disciples fatigués, l’étonnement est à son comble : Moïse et Élie sont là ! Pour parler avec Jésus de quelque chose de grave : son départ à Jérusalem. Comme si le ciel s’ouvrait pour que sa mission s’enracine effectivement dans l’histoire de l’Alliance.

J’ose imaginer qu’un sens et une force nouvelle lui sont donnés. Des forces et une paix véritable pour l’heure de la confrontation. Il n’y sera pas seul, le ciel est convoqué pour le soutenir et le confirmer.

Et s’il en était un peu de même pour nous. Notre expérience de la prière aux moments décisifs, si petite soit-elle, nous a fait goûter cette présence de Dieu, ce ciel ouvert pour que nous recevions des forces nouvelles. Nos inquiétudes s’amenuisent, notre esprit est plus serein, notre cœur et tout notre être sont en paix. Cela doit bien transparaître sur notre visage !

Nous savons aussi combien parler de ce que nous traversons comme épreuves ou comme joies, avec les témoins de notre histoire, inscrit plus profondément le sillon de notre chemin avec Dieu.

La tentation alors serait, comme Pierre qui propose de dresser 3 tentes, de nous installer dans cet espace ouvert sur le ciel. Parce que oui, il est bon que nous soyons ici !

Et bien non, Il ne savait pas ce qu’il disait, nous relate l’évangéliste avec humour… Nous devons quitter la haute montagne, rejoindre la vallée de notre vie pétrie de relations bienveillantes ou non, de tentations, de joies et de combats, de larmes et de belles fraternités ou de belles sororités spirituelles.

Pour notre marche, nous qui avons notre citoyenneté dans les cieux, Paul aux Philippiens 3, 20, Dieu ne nous laisse pas sans rien. Il nous donne sa Parole : Celui-ci est mon Fils, celui que j’ai choisi : écoutez-le. Jésus, Parole faite corps, qui sera livré pour nous et pour la multitude, pain rompu, sang versé… en signe de l’Alliance nouvelle et éternelle.

Françoise,
sœur de la Communion Béthanie

Carême 2022 – 1er dimanche

Tout au long de ce Carême 2022 et jusqu’à Pâques, retrouvez les méditations proposées par notre sœur Françoise.

Un carême d’offrandes avec Moïse
Livre du Deutéronome 26, 4-10

Et si nous entrions dans le Carême avec Moïse ?
Moïse disait au peuple : Lorsque tu présenteras les prémices de tes récoltes…

Apporter les prémices en offrande, cela demande de cueillir les premiers fruits arrivés à maturité, les premiers légumes du jardin, les premiers épis dorés… Nous les avons regardés s’épanouir au fil des jours, nous avons travaillé le sol, apportant engrais et soins, n’est-il pas normal que nous soyons les premiers à les croquer et nous régaler de ce goût incomparable ! Nous sommes si fiers de ce que nous avons produit…Et bien, contre toute attente, nous allons nous en dessaisir. Mais pas n’importe comment !

Cela se fait en prononçant des paroles devant le Seigneur : Mon père était un Araméen nomade... Ces paroles nous invitent à relire notre histoire, telle que Moïse la relit pour son peuple. Aux origines : un Araméen nomade, puis un petit clan qui devient une nation puissante. La maltraitance et la pauvreté, l’esclavage, les cris et la misère que Dieu entend et voit, puis la délivrance à mains fortes, par des signes et des prodiges.

N’en est-il pas de même pour moi ? N’est ce pas Dieu qui me conduit, sans se lasser, me faisant grandir, me délivrant de mes peurs, de mes pauvretés, me faisant sortir de mes terres d’exil et d’esclavage pour que je puisse porter du fruit ?

Oui, à la suite de Moïse, je peux dire : Et maintenant, voici Seigneur, que je t’apporte les prémices de ma vie. Ce sont les fruits que tu m’as donnés de porter. Tu as travaillé la terre de mon être, tu en as pris soin, Ils sont les fruits de ton Alliance indéfectible. Les voici en offrande, en action de grâce.
Par toi, avec toi, ils sont Eucharistie….

Voici peut-être une manière différente d’aborder ce Carême : Tu n’as voulu, ni offrande, ni sacrifice, mais tu m’as fait un corps… alors j’ai dit : Me voici. Épître aux Hébreux, 10, 5-7

Françoise,
sœur de la Communion Béthanie

Pause méditation du 28 février 2022

Une méditation proposée par notre frère Manuel.

Le pardon

Dieu tout-puissant,
aide-nous à supporter en souriant
le mal qu’on nous fait ;
chasse de nous tout désir de revanche.

Accorde-nous de ne pas rendre coup pour coup,
mais de trouver notre joie dans ta volonté,
en sorte que nous soyons portés
à te remercier et à te louer.

Dieu tout-puissant,
rappelle-nous toujours
que personne ne peut nous faire du mal,
sans se nuire mille fois plus à tes yeux.

Fais que nous soyons ainsi portés
à pardonner plutôt qu’à frapper,
à prendre en pitié plutôt qu’en haine.

Dieu tout-puissant,
fais qu’aucun de nous ne recherche
son propre avantage
au détriment du bonheur de son prochain.

Accorde-nous de rejeter toute haine
et tout esprit de discorde,
pour vivre ensemble
comme de vrais enfants de Dieu,
disant en parfaite amitié
non pas « mon Père »,
mais « notre Père ».

Martin Luther King

Je ne voudrais pas faire un exposé ici sur le pardon : parce que ce n’est ni le lieu ni le moment, et aussi parce que je ne suis pas un spécialiste. Je sais qu’on peut lire énormément de choses sur le sujet, et cela à partir d’angles très divers et complémentaires. Et c’est très bien. Je ne peux que rendre grâce pour l’effort que tant et tant de personnes font pour nous aider à réfléchir sur qu’est-ce que pardonner.

Pourtant je me sens invité à ne pas trop intellectualiser le pardon, mais à le vivre au jour le jour du mieux que je peux ; le vivre comme une course de longue haleine, sans être trop pressé d’arriver, mais sans me décourager et laisser tomber. Car le pardon n’est pas seulement un acte isolé, il conduit à une autre manière de vivre les relations difficiles et les mauvais coups que l’on reçoit.

Je vous dis, à vous qui écoutez : aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous détestent, bénissez ceux qui vous maudissent, priez pour ceux qui vous injurient. […] Aimez vos ennemis, faites du bien et prêtez sans rien espérer. Votre récompense sera grande et vous serez fils du Très-Haut, car il est bon pour les ingrats et pour les mauvais. Soyez généreux comme votre Père est généreux. Luc 6, 27-36

Manuel,
frère de la Communion Béthanie

Pause méditation du 21 février 2022

Une méditation proposée par notre sœur Céline.

Dire adieu

S’il fallait dire au revoir définitivement à tout ça maintenant…

On a tous ces fourmis écrasées comme sur des champs de batailles imaginaires dans une cour de récréation.

La vie. Minuscule. Un moment ici, un moment parti·e.

On a tous son bébé souris recueilli orphelin au fond d’une grange et qu’on essaie de nourrir en vain.

La vie. Exposée. Un moment ici. Un moment parti·e.

On a tous un proche, ou moins proche, parti pour de vrai. Famille. Ami. Ami d’un ami. Voisin. Migrant dans la mer. Idole de sa jeunesse. Maître à penser, second de cordée. Champion olympique.

La vie. Multiple et arc-en-ciel. Un moment ici. Un moment parti·e.

S’il fallait dire au revoir définitivement à tout ça maintenant… histoire de voir.

Je suis. Je ne suis plus. Un court moment ici. Un long moment parti·e.

Dire adieu.
En vérité.

Et la vie, la miséricorde et le pardon surgissent dans mon cœur !

En vérité,
La Vie comme une urgence et un miracle !

Céline,
sœur de la Communion Béthanie

Pause méditation du 14 février 2022

Une méditation proposée par notre sœur Élisabeth.

Les vieux moines

J’ai été accueilli par ces vieux moines comme un des leurs. Aimé par chacun d’eux comme un ami. J’étais chez moi chez eux. On aurait dit que j’étais attendu. Je me sentais à ma bonne place comme jamais je ne l’avais été.

Dans l’expérience pourtant inconfortable de la vie commune, j’ai goûté une paix qui surpasse tout entendement : j’en suis encore surpris. Ces frères bénédictins m’ont appris à me tenir là, immobile. A marcher sans bouger. A partir sans quitter. A être silencieux en même temps que conduit à ma propre parole. A me tenir à distance de ceux que j’aime en demeurant cependant très proche.

Ouvrant leurs portes tout autant que leur cœur, faisant de leur vie une table ouverte.

Indépendants mais s’aidant autant qu’ils le peuvent à être des amis. Plus d’une fois, … j’ai été touché par les petites attentions qu’ils se faisaient l’un à l’autre.

Père Raphaël Buyse, L’autrement Dieu, 2019 Bayard Éditions

Les frères et sœurs de la Communion Béthanie ne sont pas de « vieux moines », comme Raphaël Buyse nomme très respectueusement les frères bénédictins de l’abbaye de Clerlande qui l’ont accueilli. Je vous partage ici une réflexion personnelle et j’emprunte les mots du père. Mais lorsque j’ai lu ce beau livre et témoignage, ce passage m’a immédiatement fait penser à ce que je ressens lorsque je retrouve mes frères et sœurs de la Communion Béthanie lors de nos retraites annuelles : aimé par chacun d’eux, j’étais attendu, à la bonne place, goûté la paix, conduit à ma propre parole, une table ouverte…

Seigneur, c’est Toi qui rassembles, qui permets le respect, les échanges du cœur. Tu nous donnes à vivre des moments joyeux, heureux, dans des lieux apaisants.
En effet, quand deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis là, au milieu d’eux. Matthieu, 18, 20

Merci Seigneur pour ces rencontres, les regards et attentions de mes frères et sœurs.
En action de grâce, dans Ta Paix.

Élisabeth,
sœur de la Communion Béthanie