Une méditation proposée par notre sœur Françoise.
Frères, [nous sommes] coopérateurs de Dieu…
On nous traite d’imposteurs, et nous disons la vérité ;
On nous prend pour des inconnus, et nous sommes très connus ;
On nous croit mourants, et nous sommes bien vivants ;
On nous punit, et nous ne sommes pas mis à mort ;
On nous croit tristes, et nous sommes toujours joyeux ;
Pauvres, et nous faisons tant de riches ;
Démunis de tout, et nous possédons tout.
2<sup>e</sup> lettre de saint Paul aux Corinthiens (6,1-10)
Ai-je pris conscience de ce beau titre de coopérateurs de Dieu ?
Sans doute un peu, mais ce que cela révèle de l’image que je renvoie, sans doute pas toujours !
Je ne suis pas une inconnue, alors même que je chercherais plutôt la discrétion ; un fond de timidité qui m’a longtemps marquée…
Je suis profondément vivante, quand bien même il a fallu traverser les ravins de la mort, ceux de l’angoisse, de mes enfermements, de la non reconnaissance, des oppositions…
Je n’ai pas été mise à mort, découvrant des ressources insoupçonnées face à l’adversité, à la détresse, à l’abandon… Je les ai reçues de Toi.
En Toi, dans l’assurance de ta présence ressuscitante, j’ai goûté la joie étonnante au-delà de la détresse et de l’affliction. Il y a une joie profonde que nul ne peut me ravir. Celle d’être riche de ma pauvreté, parce qu’elle m’ouvre des horizons lumineux de rencontres vécues à l’aune de la compassion, du non-jugement, dans l’accueil de la beauté et de la richesse de l’autre, attentive à toute vie en germe, en puissance.
Je suis coopératrice de Dieu, et je ne suis pas dans l’imposture, loin s’en faut, en reconnaissant tout homme, toute femme, toute personne dans son identité profonde. C’est la vérité de ce Dieu d’amour qui me fait vivre. Il affute sans se lasser mon regard pour reconnaître cette puissance de vie à l’œuvre, parfois au-delà de toute espérance !
Au moment favorable je t’ai exaucé…
Le voici déjà là le moment favorable !
Deo gratias
Françoise,
sœur de la Communion Béthanie
Une méditation proposée par notre sœur Françoise.
Depuis plus de huit jours, nos cœurs sont déchirés devant tant de violence et d’atrocités, devant tant de peurs et de larmes. Les paroles de l’apôtre Jean résonnent en moi : Près de la croix de Jésus, sa mère se tenait debout.
Les spécialistes, les hommes politiques, les experts parlent, décryptent, supputent… C’est leur rôle. En Communion Béthanie, notre place est de nous tenir, comme Marie, debout, avec notre immense peine… Cette terre d’Israël est blessée d’une si grande blessure ! Pourra-t-elle s’en remettre ? Voilà pourquoi nous devons nous tenir debout, dans la prière et dans l’espérance, comme Marie. Cette espérance, même faiblement, brille au plus profond des ténèbres. Étrangement, la liturgie nous a donné à entendre dimanche, ces paroles du prophète Isaïe.
Le Seigneur de l’univers préparera pour tous les peuples, sur sa montagne, un festin de viandes grasses et de vins capiteux… Sur cette montagne, il fera disparaître le voile de deuil qui enveloppe tous les peuples et le linceul qui couvre toutes les nations. Il fera disparaître la mort pour toujours. Le Seigneur Dieu essuiera les larmes sur tous les visages, et par toute la terre il effacera l’humiliation de son peuple. Et ce jour-là, on dira : Voici notre Dieu, en lui nous espérions, et il nous a sauvés.
Nous tenir debout parce que c’est comme cela que Marie nous dit de faire, et parce que nous avons Pâques.
Pâques est la fête de l’espérance. Nous espérons que les larmes seront changées en perles. Cette transformation ne se fera pas toute seule : c’est à nous de venir poser nos plaies dans celles du Christ et de maintenir nos cœurs blessés dans le flot d’amour qui jaillit de celui, transpercé, du Ressuscité.
Anselm Grün
C’est à nous, frères et sœurs, de venir poser les plaies de tous ces hommes, de toutes ces femmes, de venir poser ces cœurs brisés dans les plaies, dans le cœur du Christ. Un jour viendra, nous le croyons, où les larmes des habitants de cette terre, les larmes de toute l’humanité, en perles seront changées.
Françoise,
sœur de la Communion Béthanie
Une méditation proposée par notre sœur Françoise.
« Je suis une maison de prière… Saint Paul me désigne comme un temple de l’Esprit. Je suis bâti par et pour Dieu. Et c’est la prière qui me le dit, c’est elle qui me construit. Bien sûr, je suis bâti pour l’amour. Mais le même Esprit de Jésus me suggère que c’est tout un, prier et aimer. C’est pour cela qu’il me construit à ciel ouvert. Je n’ai pas à lui ouvrir, car c’est de l’intérieur qu’Il vient et qu’Il opère ; voilà pourquoi on ne sait jamais trop d’où il vient, ni surtout comment s’édifier soi-même dans l’amour. »
Christian de Chergé, dans L’Invincible espérance, Éditions Bayard.
Thérèse d’Avila dit, non sans humour, qu’il faut veiller à faire de la place pour accueillir l’hôte intérieur afin de pouvoir s’entretenir avec lui et rechercher sa compagnie…Ce temple est à « ciel ouvert ». Il laisse s’échapper vers le haut ce qui monte du cœur de l’homme : l’émerveillement et les remerciements devant tant de belles choses de la vie, la crainte et l’angoisse, les multiples peurs, la souffrance et le gémissement de l’être devant l’inachèvement des choses, le bonheur et la paix profonde…
La prière n’est pas un acte extérieur à l’homme qui viendrait essentiellement de sa volonté. Elle naît du plus profond de ses entrailles, dans l’épaisseur de sa chair et de son histoire, comme inspirée de l’intérieur, parfois presque à son insu…
Cette prière est antérieure à la volonté de prier. Elle est déjà là, au fond du cœur. Elle ne vient pas de soi mais de l’Esprit en soi. « Je n’ai pas à lui ouvrir car c’est de l’intérieur qu’Il vient et qu’Il opère ». L’Esprit Saint et la chair de l’homme s’unissent en une unique prière. La très belle finale de l’Apocalypse exprime avec force l’unité de l’Esprit Saint et du cœur de l’homme en un unique désir : « L’Esprit et l’épouse disent : Viens ! ». Viens est un mot très intime du langage amoureux. « Que l’homme de désir s’approche et qu’il reçoive l’eau de la vie gratuitement. » Ap 22,17. On comprend que Christian de Chergé nous rappelle qu’« Aimer et prier c’est tout un ! »
Extrait de Prier 15 jours avec Christian de Chergé par Christian Salenson, Editions Nouvelle Cité.
Françoise,
sœur de la Communion Béthanie
Une méditation proposée par notre sœur Françoise.
C’est un père qui aime son enfant. Un père qui appelle toute personne à l’aide pour que son fils guérisse. Que ne ferait-il pas pour lui ?
Il a demandé cette aide aux disciples de Jésus mais ils n’ont rien pu faire ! Aussi, quand il se tourne vers Jésus, sa demande est prudente : Si tu peux quelque chose, viens à notre secours, par compassion envers nous !
Si tu peux ! Voici une parole qui ne convient pas à Jésus… Qu’il ne peut admettre parce qu’elle minimise les forces cachées des êtres qui l’interpellent. Pourquoi dire si tu peux ?
Alors il renverse la situation. Tout est possible pour celui qui croit.
Qu’en est-il pour moi ? Ne suis-je pas en deçà dans mes demandes parce que je doute de la force de ma prière, de la légitimité de mes demandes, de la puissance de ma foi. Une petite voix dans ma tête ne me dit-elle pas : A quoi bon ! Ou encore, et c’est bien plus grave : Ça ne marchera pas !
La réponse de ce papa est magnifique : Je crois ! Viens au secours de mon manque de foi !
Ce double mouvement est étonnant mais si juste… Oui, je crois mais pas sans Toi, Jésus ! Il y a tant de manques en moi ! J’ai besoin de Toi pour que ma foi grandisse, pour que ma prière soit plus forte avec Toi, pour que ma confiance en sa puissance creuse son puits et s’abreuve aux sources de Ton amour…Je crois mais pas sans mes frères et sœurs dans la foi, qu’ils soient juifs, chrétiens, musulmans, hindouistes, bouddhistes ou croyants dans leur propre sagesse. La puissance de leur prière m’est nécessaire. Ensemble, la force de nos demandes se déploie pour que les êtres se relèvent, se mettent debout, se libèrent…
Je crois, c’est vrai…mais viens, Seigneur, venez frères et sœurs, vous tous, les priants de la terre… Venez au secours de mon manque de foi !
Françoise,
sœur de la Communion Béthanie
Une méditation sélectionnée par notre sœur Françoise.
Je t’aimais. Je t’aime. Je t’aimerai. Il ne suffit pas d’une chair pour naître.
Il y fait aussi cette parole. Elle vient de loin. Elle vient du bleu lointain des cieux, elle s’enfonce dans le vivant, elle ruisselle sous les chairs du vivant comme une eau souterraine d’amour pur.
Ce n’est pas nécessaire de connaître la Bible pour l’entendre. Ce n’est pas nécessaire de croire en Dieu pour être vivifié par son souffle.
Cette parole imprègne chaque page de la Bible, mais elle imprègne aussi bien les feuilles des arbres, les poils des animaux et chaque grain de poussière volant dans l’air. Le fin fond de la matière, son dernier noyau, sa pointe ultime, ce n’est pas la matière mais cette parole. Je t’aime. Je t’aime d’un amour éternel, éternellement tourné vers toi – poussière, bête, homme. (…). Avant de planer sur les berceaux, avant de danser aux lèvres des mères, cette parole se fraie un chemin au travers des voix (…). Et par le travers, et par en dessous, et par en dessus, l’esprit du vent, la folle rumeur, le bourdonnement dans le sang rouge : Je t’aime. Bien avant que tu sois né. Bien avant la fin des temps. Je t’aime dans toutes éternités.
Christian Bobin, Le Très bas.
Françoise,
sœur de la Communion Béthanie
Une méditation sélectionnée par notre sœur Françoise.
C’est une question enfantine Elle est posée par l’âme qui s’agite dans une poignée de ciel bleu sous un silence trop grand pour elle : D’où je viens, moi qui n’étais pas toujours là ? Où j’étais quand je n’étais pas né ?
Notre époque a la réponse la plus courte qui soit : tu viens d’une copulation entre ton père et ta mère…
Au treizième siècle, au siècle de François d’Assise, la réponse était plus longue, beaucoup plus longue, même si elle se révélait aussi peu capable d’éteindre la question…Au treizième siècle on venait de Dieu et on y retournait.
La réponse était dans la Bible, ne faisait qu’un avec le Livre. Elle n’était pas tant dans la Bible que dans le cœur de celui qui lisait la Bible pour y trouver la réponse.
Et il ne pouvait bien lire qu’en faisant entrer sa lecture dans chacun de ses jours. La réponse n’était pas lue, mais éprouvée – charnellement éprouvée, mentalement éprouvée, spirituellement éprouvée.
Ce n’était pas une réponse de professeurs. Les professeurs sont des gens qui apprennent aux autres les mots qu’eux-mêmes ont trouvés dans les livres.
Mais on n’apprend pas dans un livre d’air. On en reçoit par intervalles la fraîcheur. On tressaille sous le souffle d’une parole : je t’aimais bien avant que tu sois né. Je t’aimerai bien après la fin des temps. Je t’aime dans toutes éternités…
Et avant d’être dans la Bible, cette parole, où elle était, d’où elle venait ?
Elle planait sur le vide des terres et sur le vide des cœurs. Elle était première. Elle avait toujours été là.
La parole d’amour est antérieure à tout, même à l’amour.
Christian Bobin, in Le très-bas.
Françoise,
sœur de la Communion Béthanie
Une méditation proposée par notre sœur Françoise.
Mais qu’est-ce que vivre ? L’homme est-il condamné à vivre seulement de pain ?
Jésus invite ces hommes et ces femmes à porter plus haut leur désir de vie. Le pain qu’il leur a donné est le signe d’une nourriture plus forte, plus nourrissante et plus désirable : une nourriture d’éternité.
S’il a multiplié les pains, ce n’est pas pour qu’ils (les hommes et les femmes qui constituent la foule) en soient béatement rassasiés et qu’ils en restent là, mais pour creuser leur faim et leur désir.
Il leur demande donc de travailler non pour la nourriture périssable, mais pour la nourriture qui demeure en vie éternelle. Quel est ce travail ?
C’est le travail du désir sur lui-même.
Le désir de vivre ne doit pas s’arrêter à une satisfaction matérielle… Il doit aller jusqu’au bout de lui-même, s’ouvrir à la plénitude de la vie.
Il doit devenir le désir d’une vie éternelle.
Éloi Leclerc, in Le Maître du désir
Je suis donc invitée à renouer avec mon être de désir. Il se conjugue avec la plénitude de la vie…
Désir de vie éternelle…
Participer à la propre vie de Dieu dans le Fils bien-aimé. Est-ce cela le désir de la vie éternelle ?
C’est un travail de chaque instant, une soif et une ardeur de vivre que rien de fini ne peut apaiser.
Éloi Leclerc
Merci Seigneur pour cette ardeur de vivre en moi, pour l’ardeur de vivre de ceux que je rencontre et qui me révèle ton amour pour chacun de nous.
Françoise,
sœur de la Communion Béthanie
Une méditation proposée par notre sœur Françoise.
J’aime le mois de Septembre qui inaugure l’arrivée prochaine de l’automne.
L’air est plus doux, les ciels écrasants de l’été font place à des bleus tendres…
La nature reprend un nouveau souffle. Tout s’apaise…Peut-être pour permettre à nous aussi de souffler avant de reprendre le rythme de nos vies trépidantes.
J’aime le mois de Septembre et la fraîcheur du soir propice au repos.
J’aime ses orages, les éclairs rugissants et le grondement du tonnerre. J’aime la pluie bienfaisante.
J’aime quand l’herbe sèche, brûlée aux ardeurs du soleil, reverdit et reprend vie.
J’aime le plaisir de découvrir sur les étals du marché les premiers légumes colorés de l’hiver, les premières corbeilles de cèpes.
J’aime retrouver une marche légère, plus vive dans l’air frais du matin…
Un chant monte dans mon cœur… une prière de Charles de Foucauld.
Mon Créateur, mon Père, mon Bien-Aimé, Vous êtes la Beauté suprême ! Toute beauté créée, beauté de la nature, du ciel au coucher du soleil, de la mer unie comme une glace sous un ciel bleu, des forêts sombres, des jardins fleuris, des montagnes, des grands horizons du désert, des neiges et des glaciers, beauté d’une belle âme se reflétant sur un beau visage, beauté d’une belle action, d’une belle vie, d’une grande âme, toutes ces beautés ne sont que les plus pâles reflets de la Vôtre, mon Dieu. Tout ce qui a charmé mes yeux en ce monde n’est que le plus pauvre, le plus humble reflet de votre Beauté infinie.
Françoise,
sœur de la Communion Béthanie
Tout au long de ce Carême 2022 et jusqu’à Pâques, retrouvez les méditations proposées par notre sœur Françoise.
D’après Prier 15 jours avec Christian de Chergé, par Christian Salenson
Et si nous parlions de la croix ? me demandait récemment l’un de nos amis soufis.
L’ami soufi avait dit : peut-être trois ? Cette troisième croix, n’était-ce pas moi, n’était-ce pas lui, dans cet effort qui nous portait, l’un et l’autre, à nous démarquer de la croix de derrière, celle du mal et du péché, pour adhérer à celle de devant, celle de l’amour vainqueur.
Christian de Chergé
Devant
L’homme a été créé en forme de croix. Aussi l’homme ouvre-t-il les bras. Le jeune enfant se précipite et trouve refuge dans les bras ouverts de son père ou de sa mère. Homme et femme se prennent dans les bras l’un de l’autre. Rien de tel que les bras ouverts pour être à l’image et à la ressemblance du Père ! Dieu a créé l’homme en forme de croix, inscrivant en son corps sa vocation, corps ouvert aux dimensions de l’univers et de l’accueil de l’autre.
Mais la croix de devant est fragile. L’homme a vite fait de se replier. Craintif ou menacé par la peur de perdre son bonheur, l’homme court le risque de refermer les bras.
La croix de devant, c’est l’homme créé bras ouverts en acceptant de ne pas posséder ceux qu’il aime.
Derrière
La croix de derrière est une invention des hommes. Elle consiste à prendre la croix de devant et à l’enchaîner brutalement au bois. Jésus n’était qu’amour et liberté, accueillant bras ouverts ceux qu’il rencontrait. Il a été cloué au bois par les chefs religieux et le pouvoir politique.
Le baiser de trahison, tel une lance, a ouvert son côté. Les reniements de ses proches ont tressé la couronne d’épines. La croix de derrière fut celle de l’amour trahi.
Chacun fait l’expérience de la croix de derrière. Il est des hommes qui vivent des drames inqualifiables, victimes innocentes, corps torturés, méprisés, tués…
De manière moins criante, chacun peut être crucifié à l’endroit où il aime.
Si l’homme qui ouvre les bras prend la ressemblance de Dieu, Dieu, en son fils crucifié prend la ressemblance des hommes, de ceux qui ont pris le risque de l’amour et qui en souffrent.
Cette deuxième croix ne sauve pas ! Point n’est besoin de la justifier, et par là même de blasphémer ! Elle est la souffrance que le monde sans Dieu impose à Dieu disait le théologien Dietrich Bonhoeffer, mort en camp de concentration.
Les crucifix de la période moderne présentent des Christ tourmentés. Ils expriment la souffrance bien réelle de notre humanité. Ils risquent cependant de voiler la troisième croix. Les Christ romans n’étaient pas défigurés, offrant au contraire un visage serein, rayonnant la paix. Ils nous initient à un autre aspect de la croix, celle entrevue par l’ami musulman : celle où la souffrance y est déjà transfigurée par l’amour.
Peut-être trois…
Dans la troisième croix s’accomplit le salut. En quoi consiste cette troisième croix ? Elle consiste à ouvrir les bras ou à réapprendre à ouvrir les bras, précisément là où la vie nous blesse. La tendance spontanée consiste à se refermer, à se replier sur soi, sur sa solitude ou sa souffrance. C’est bien naturel et compréhensible ! Le risque est grand de s’aigrir, de se dessécher, de fuir… Pourtant, un autre chemin est possible, ouvert par la croix du Christ.
Chemin de croix
Alors commence pour chacun un chemin de croix où passant de la croix de derrière, celle de la souffrance infligée, à la croix de devant, l’amour encore offert, il va apprendre encore et toujours à dénouer les bras…
La troisième croix ressemble à s’y méprendre à la croix de devant. Apparemment rien n’a changé ! La personne est à nouveau capable d’ouvrir les bras, sauf qu’elle les ouvre en traversant la blessure. Souffrance transfigurée… chemin de résurrection et de vie nouvelle !
Christian Salenson
Frères et sœur nous savons bien que ce passage de l’une à l’autre croix, c’est bien là notre chemin de croix et aussi notre chemin de gloire, car c’est par là que Jésus nous élève, avec lui, vers le Père qui nous attend tous, bras ouverts.
Christian de Chergé
Tout au long de ce Carême 2022 et jusqu’à Pâques, retrouvez les méditations proposées par notre sœur Françoise.
Toute la foule des disciples, remplie de joie se mit à louer Dieu à pleine voix pour tous les miracles qu’ils avaient vus, et ils disaient : Béni soit celui qui vient, le Roi, au nom du Seigneur. Paix dans le ciel et gloire au plus haut des cieux !
Maître, réprimande tes disciples ! Mais il prit la parole en disant : Je vous le dis : si eux se taisent, les pierres crieront.
C’est un temps de joie pour les disciples, Jésus entre à Jérusalem, assis sur un ânon. Ils connaissent le symbole messianique qu’il représente. Jésus est le messie qui vient délivrer de l’oppression. C’est bien le Roi tant attendu !
Ont-ils conscience que cet ânon représente l’humilité et que Jésus ne vient pas en conquérant mais en serviteur ?
Quel paradoxe : Au moment où Il est dit Paix, une tout autre histoire se dessine, faite de lâchetés, de haine, de violences et de mort.
Jésus le sait. Il connaît le livre d’Isaïe : Je ne me suis pas dérobé. J’ai présenté mon dos à ceux qui me frappaient… Je n’ai pas caché ma face devant les outrages et les crachats. Tout comme le psaume 21 : Ils me percent les mains et les pieds, je peux compter tous mes os.
Il prépare ses proches à ce qui va lui arriver, à cet effroyable qui va le mener au plus grand abaissement, au plus grand abandon, par amour, parce qu’il faut se tenir là, au lieu de la souffrance extrême et de la mort, pour tout sauver.
En ce dimanche des Rameaux, le récit de la Passion est lu, en entier. Pour que nous entendions, que nous comprenions ! La louange et la bénédiction ne peuvent faire l’impasse de l’abaissement, et de la mort de la croix !
Nous aurons encore le Vendredi Saint pour pleurer avec les femmes, à ce moment où les pierres se sont tues…pour pleurer sur notre monde !
Mais pour l’heure, cette joie doit être…aussi… Elle est celle de la gratitude. La louange est là, à pleine voix, pour tous les signes de guérison, de libération, de la vie qui gagne sur la mort.
Et lorsque Jésus fracassera son tombeau, il n’y aura désormais plus moyen de faire taire les disciples. Depuis, si nous tous, disciples du Seigneur, nous nous taisons, les pierres crieront !
Françoise,
sœur de la Communion Béthanie
Tout au long de ce Carême 2022 et jusqu’à Pâques, retrouvez les méditations proposées par notre sœur Françoise.
Comment ne pas être saisi de compassion pour cette femme ! Amenée sans ménagement au milieu d’une foule. Mise à l’index par l’accusation d’adultère portée à son encontre ! Sa vie, dont la fin est annoncée par la loi qui la condamne, est suspendue à la réponse d’un homme.
Jésus, appelé Maître par ceux-là mêmes qui ne comprennent pas, n’entendent pas ses paroles de vie, se comporte mystérieusement ! Il s’abaisse et il écrit sur la terre.
Il ne veut pas se tenir face à eux, en position de rabbi… Ne pas les surplomber… Alors, il se fait petit. Il ne les regarde pas, il écrit sur le sol, non par mépris, mais peut-être pour ne pas heurter ces hommes prisonniers de cette sorte de suffisance que procure l’application stricte de la loi.
Il s’abaisse, se faisant humble, dans une attitude qui désamorce la violence.
Attitude de prière, de réflexion… Il entre dans la grande compassion qui le fait rencontrer chacune et chacun à l’endroit de la vérité de sa vie.
Et la vérité de la vie est que personne ne peut se prévaloir de n’avoir jamais péché. Celui qui est sans péché, qu’il soit le premier à lui jeter une pierre.
Jésus se baisse à nouveau, aussitôt. Pour que, scribes et pharisiens, ne se sentent pas jugés, mais convoqués à être vrais avec eux-mêmes.
L’agir de Jésus, qu’il manifeste tout au long des évangiles, est là : pour chacune de ses rencontres, atteindre le cœur de l’être humain à l’endroit de cette vérité qui le rendra libre. Là où souffle l’Esprit ! Car il sait ce que la loi, appliquée comme une sentence, provoque : la désespérance, l’enfermement, la mort, la difficulté d’un retour à une vie bonne, tournée vers Dieu, ce Père plein d’amour à qui rien n’est impossible. Or, le désir du Père est qu’aucun de ceux qu’il a confié à son Fils ne soit perdu !
La femme est restée là, debout, au milieu, saisie ! Jésus se redresse. Il s’adresse à elle : femme.. Elle existe pour lui, même si son nom est inconnu. Elle peut ainsi poser sa propre parole et mesurer la remise en question fondamentale dont ses accusateurs ont fait preuve pour s’en aller, les uns après les autres, et ne pas la condamner !
Oui, il est vraiment Seigneur, celui qui nous dit : Moi non plus je ne te condamne pas. Va… Va vers une vie plus ajustée à ton vrai désir, plus ajustée au désir de Dieu pour toi. C’est un appel à une vie nouvelle et en même temps, à une exigence de vérité avec soi-même. Un appel à avancer sur nos chemins pas toujours très droits sans crainte, ni trouble au visage, une belle invitation à marcher en enfant de lumière.
Françoise,
sœur de la Communion Béthanie
Tout au long de ce Carême 2022 et jusqu’à Pâques, retrouvez les méditations proposées par notre sœur Françoise.
En ce temps-là, les publicains et les pécheurs venaient tous à Jésus pour l’écouter. Les pharisiens et les scribes récriminaient contre lui : Cet homme fait bon accueil aux pécheurs, et il mange avec eux !
Alors il entra en lui même et dit… Je me lèverai.
Il fallait bien qu’elles arrivent, ces récriminations ! Nous y voilà… Jésus a une attitude libre qui dérange. Il va devoir faire front au légalisme desséchant.
Écoute et prête l’oreille de ton cœur, nous dit saint Benoît dans sa règle. Il en est ainsi des publicains et des pécheurs qui viennent TOUS à Jésus pour l’écouter !
Les pécheurs prêtent l’oreille de leur cœur et accueillent une parole qui les rejoint au profond de leurs pauvretés, de leurs exclusions, au profond de leur désir. Ils entendent une parole de vie qui les relève. C’est une parole forte et douce à la fois, simple et sans équivoque, comme lorsqu’ils s’émerveillent de la conversion de Zachée : Aujourd’hui le salut est entré dans cette maison.
Jésus est proche et il ne craint pas de manger avec eux. Et peu importe que cela plaise ou non aux pharisiens et aux scribes, dont il relèvera la dureté de cœur.
C’est pourquoi Jésus leur dit cette parabole : Un homme avait deux fils…
C’est une histoire où il est question de mort et de vie. Une réponse aux pharisiens et aux scribes, que Jésus qualifiera de sépulcres blanchis, c’est tout dire !
Ce père, Père de chacun de nous, se tient jour après jour dans l’espérance du retour de son jeune fils. Où est-il ? Quelles épreuves traverse-t-il ? Il l’a guetté fidèlement pour l’apercevoir de loin ! Lui demande-t-il des comptes ? Lui fait-il reproche d’avoir dilapidé sa fortune ? Il court se jeter à son cou et le couvre de baisers. Magnifique geste d’amour qui ne condamne pas. La miséricorde de Dieu va bien au-delà de toutes les institutions légalistes qui se vivent comme une fin en soi et n’ont d’autres horizons que le péché commis. Bien au-delà de tous les conformismes religieux qui veulent faire tomber et non vivre – Véronique Margron, La douceur inespérée.
Car mon fils que voilà était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu et il est retrouvé.
C’est l’unique raison, la véritable raison du festin. Une si belle manière de partager cette joie incommensurable de voir son enfant revenu de la mort ! Repas de fête et de bénédiction !
Lorsque Jésus mange avec les publicains et les pécheurs, c’est le festin du Royaume qu’il inaugure. Chaque fois que nous prêtons l’oreille de notre cœur à la Parole qui réveille notre désir profond de revenir à la vie, chaque fois que nous entrons en nous même pour nous reconnaître humblement pauvre mais tellement aimé du Père, nous goûtons la joie d’être à nouveau debout.
C’est le sens de l’être au monde de Jésus : révéler la puissance de la résurrection à l’œuvre. Son immense désir est que chacun, chacune, dans l’amour du Père, puisse se tenir debout, en ressuscité. Il le paiera de sa vie mais désormais le péché pas plus que la mort n’auront le dernier mot.
Françoise,
sœur de la Communion Béthanie