Tout au long de ce Carême 2025 et jusqu’à Pâques, retrouvez les méditations proposées par notre frère Sébastien.
Lorsqu’ils approchèrent de Jérusalem, et qu’ils furent arrivés à Bethphagé, vers la montagne des Oliviers, Jésus envoya deux disciples, en leur disant : Allez au village qui est devant vous ; vous trouverez aussitôt une ânesse attachée, et un ânon avec elle ; détachez-les, et amenez-les-moi.
Si, quelqu’un vous dit quelque chose, vous répondrez : Le Seigneur en a besoin. Et à l’instant il les laissera aller.
Or, ceci arriva afin que s’accomplît ce qui avait été annoncé par le prophète :
Dites à la fille de Sion : Voici, ton roi vient à toi, Plein de douceur, et monté sur un âne, Sur un ânon, le petit d’une ânesse.
Les disciples allèrent, et firent ce que Jésus leur avait ordonné.
Ils amenèrent l’ânesse et l’ânon, mirent sur eux leurs vêtements, et le firent asseoir dessus.
La plupart des gens de la foule étendirent leurs vêtements sur le chemin; d’autres coupèrent des branches d’arbres, et en jonchèrent la route.
Ceux qui précédaient et ceux qui suivaient Jésus criaient : Hosanna au Fils de David ! Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ! Hosanna dans les lieux très hauts !
Lorsqu’il entra dans Jérusalem, toute la ville fut émue, et l’on disait : Qui est celui-ci ?
La foule répondait : C’est Jésus, le prophète, de Nazareth en Galilée.
Mathieu 21, 1-11
L’âne est l’humble qui soutient le Christ pour l’ultime rentrée dans la ville.
La tête basse, il se sait en marche vers le Haut.
Depuis l’enclos, toujours inutile, il s’était balancé au-dessus du vide de sa vie.
Il se sentait peureux. Le danger le guettait.
Si faible depuis que sa mère l’avait à ce point dressé contre le plaisir des chevaux.
Renonçant servile, il les apercevait pourtant bien, les autres.
Ânes aux enfants rieurs qui savaient se cabrer pour une carotte !
Qu’il est drôle ce monde qui se vit dans l’innocence du plaisir.
Comment peut-on galoper quand on ne connaît pas la route, déclamer quand on sait combien la joie s’effrite ?
Il s’y était essayé pourtant, à marcher à l’abri du troupeau des autres.
Mais il ne résistait jamais bien longtemps.
Il reprenait toujours une bassesse mystérieuse.
Il se redéplaçait à l’envers.
Il pressentait son destin d’humble grandi.
Il ne sait toujours pas pourquoi il fut choisi ce jour-là.
Un éclair, une lumière. Il était seul sous le porche.
Un jour tout ordinaire pour lui, à l’abri de l’olivier.
Puis soudain, la foule avait grandi de joie.
Une clameur, des regards partout posés sur cet homme au manteau aveuglant, son compagnon de route.
L’évidence lui avait rendu sa fierté.
Sa main l’avait effleuré comme une caresse immensément soignante.
Il n’avait jamais ressenti l’âme d’une peau. Elle exhalait.
Enfin sa petite gloire à lui de servir le Seigneur,
Sa joie immense d’animal déclassé d’être le premier sous Lui.
Libre et fier enfin, ce petit d’âne sur le tapis des rameaux.
Comme tu m’es modèle, toi le gris des champs, quand tu crois enfin à ta dignité.
Merci Seigneur de m’avoir relevé.
Sébastien,
frère de la Communion Béthanie
Tout au long de ce Carême 2025 et jusqu’à Pâques, retrouvez les méditations proposées par notre frère Sébastien.
Ainsi parle le Seigneur,
Lui qui fit un chemin dans la mer,
un sentier dans les eaux puissantes,
Lui qui mit en campagne des chars et des chevaux,
des troupes et de puissants guerriers ;
les voilà tous couchés pour ne plus se relever,
ils se sont éteints, consumés comme une mèche.
Le Seigneur dit :
Ne faites plus mémoire des événements passés,
ne songez plus aux choses d’autrefois.
Voici que je fais une chose nouvelle :
elle germe déjà, ne la voyez-vous pas ?
Oui, je vais faire passer un chemin dans le désert,
des fleuves dans les lieux arides.
Les bêtes sauvages me rendront gloire,
– les chacals et les autruches –
parce que j’aurai fait couler de l’eau dans le désert,
des fleuves dans les lieux arides,
pour désaltérer mon peuple, celui que j’ai choisi.
Ce peuple que je me suis façonné
redira ma louange.
Livre d’Isaïe 43, 16-21
Arbrisseau plein de promesses qui veut déjà redevenir graine.
Drôle d’enfant que celui qui s’enterre lui-même,
Si jeune, si lourd.
Plus d’innocence quand la gravité l’habite.
Bagarreur ou fuyant. Pas de demi-mesure: ne saurait-il pas aimer ?
S’écarterler à lui-même,
Une torture qui n’en finit pas, chaque matin reprise.
Se défaire à tout prix de ce qui le trouble.
Douleur sourde et lancinante.
Étrange vigilance à tenir, si lourde pour le gosse.
Il veut sortir ce qui cloche du dedans de lui-même.
Il veut s’ouvrir seul une travée dans les flots.
Différence, anomalie, cabosse ou malformation,
A peine esquissée, mais qui ne laisse pas de doute.
Peur qu’elle se dévoile. Terreur qu’elle trahisse.
Être nu et spolié de soi.
Oui le gamin veut déjà disparaître.
Il se vit taupe en chemin.
Obscurité et frayeur, seul en galeries souterraines, toujours la tête baissée.
Où étais-Tu Seigneur pour ce drôle?
Quand s’est-il vu contemplé par Toi ?
Il ne Te connaissait pas encore.
Il ne se savait pas tant aimé.
Impensable de Ta grâce sur sa différence.
Gossicide que Tu as pourtant empêché, net et tard.
J’en témoigne : Tu m’as sauvé.
Tu étais déjà dans ma poche à billes.
Il se répare encore ce drôle d’adulte.
C’est lui mon trésor.
Pauvreté sans solitude, au final.
Ta Croix lui a évité la terre battue, je le sais aujourd’hui.
Racines de l’oppression précoce qui m’irriguent désormais en Toi.
Seigneur, fais donc jaillir tôt la vie féconde, dès les enfances différentes.
Sébastien,
frère de la Communion Béthanie
Tout au long de ce Carême 2025 et jusqu’à Pâques, retrouvez les méditations proposées par notre frère Sébastien.
En ce temps-là,
les publicains et les pécheurs
venaient tous à Jésus pour l’écouter.
Les pharisiens et les scribes récriminaient contre lui :
Cet homme fait bon accueil aux pécheurs,
et il mange avec eux !
Alors Jésus leur dit cette parabole :
Un homme avait deux fils.
Le plus jeune dit à son père :
Père, donne-moi la part de fortune qui me revient.
Et le père leur partagea ses biens.
Peu de jours après,
le plus jeune rassembla tout ce qu’il avait,
et partit pour un pays lointain
où il dilapida sa fortune en menant une vie de désordre.
Il avait tout dépensé,
quand une grande famine survint dans ce pays,
et il commença à se trouver dans le besoin.
Il alla s’engager auprès d’un habitant de ce pays,
qui l’envoya dans ses champs garder les porcs.
Il aurait bien voulu se remplir le ventre
avec les gousses que mangeaient les porcs,
mais personne ne lui donnait rien.
Alors il rentra en lui-même et se dit :
Combien d’ouvriers de mon père ont du pain en abondance,
et moi, ici, je meurs de faim !
Je me lèverai, j’irai vers mon père,
et je lui dirai :
Père, j’ai péché contre le ciel et envers toi.
Je ne suis plus digne d’être appelé ton fils.
Traite-moi comme l’un de tes ouvriers.
Il se leva et s’en alla vers son père.
Comme il était encore loin,
son père l’aperçut et fut saisi de compassion ;
il courut se jeter à son cou
et le couvrit de baisers.
Le fils lui dit :
Père, j’ai péché contre le ciel et envers toi.
Je ne suis plus digne d’être appelé ton fils.
Mais le père dit à ses serviteurs :
Vite, apportez le plus beau vêtement pour l’habiller,
mettez-lui une bague au doigt et des sandales aux pieds,
allez chercher le veau gras, tuez-le,
mangeons et festoyons,
car mon fils que voilà était mort,
et il est revenu à la vie ;
il était perdu,
et il est retrouvé.
Et ils commencèrent à festoyer.
Or le fils aîné était aux champs.
Quand il revint et fut près de la maison,
il entendit la musique et les danses.
Appelant un des serviteurs,
il s’informa de ce qui se passait.
Celui-ci répondit :
Ton frère est arrivé,
et ton père a tué le veau gras,
parce qu’il a retrouvé ton frère en bonne santé.
Alors le fils aîné se mit en colère,
et il refusait d’entrer.
Son père sortit le supplier.
Mais il répliqua à son père :
Il y a tant d’années que je suis à ton service
sans avoir jamais transgressé tes ordres,
et jamais tu ne m’as donné un chevreau
pour festoyer avec mes amis.
Mais, quand ton fils que voilà est revenu
après avoir dévoré ton bien avec des prostituées,
tu as fait tuer pour lui le veau gras !
Le père répondit :
Toi, mon enfant, tu es toujours avec moi,
et tout ce qui est à moi est à toi.
Il fallait festoyer et se réjouir ;
car ton frère que voilà était mort,
et il est revenu à la vie ;
il était perdu,
et il est retrouvé !
Luc 15, 1-3.11-32
Longtemps je t’ai craint.
Viril et barbu, aux mains abîmées par le travail de la vigne et l’usine.
Rudesse sans noblesse, fureur de la droiture.
Noirceur du mineur, sans le livre ou la musique.
Enfant, j’ai redouté tes reproches,
Moi à l’école, toi à la terre ;
Toi l’homme accompli, moi le raffiné honteux.
Ta maison tremblait de coups et de diatribes.
Ta foudre aurait pu me cisailler.
Net, j’aurais disparu.
A moi les Arts, à toi le combat.
Sans dignité, jamais je ne pouvais T’atteindre.
J’ai fini par T’oublier pour vivre.
Je T’ai fui, je T’ai ri au nez.
J’ai vaqué sur des chemins perdus.
Je les ai tracés moi-même et sans équerre.
Je me suis abîmé dans l’outrance ;
Elle m’a fait sortir de moi avec raison.
J’ai donné mon corps tant de fois.
Ses cris d’amour me suffoquaient à mourir.
J’ai couru si loin, si vite,
Sans souffle, sans pause.
Je n’ai jamais revu Ta maison sans être vieux à mon tour.
J’avais peur de Te revenir sans me renier.
Je ne veux pas me casser dans Tes bras, Père.
Entoure-moi comme un cristal qui pleure.
Au Ciel, enfin réconciliés,
Toi et moi,
Dans la lumière de Ton amour inconditionnel.
Se pardonner l’errance et la fuite.
Les mots injustes, ceux qui ne se disent plus,
Les saints écrits qui te disent en colère.
Tu me manques enfin, papa de cette terre.
Seigneur Père, accueille-le lui aussi, frêle et doux.
Sébastien,
frère de la Communion Béthanie
Tout au long de ce Carême 2025 et jusqu’à Pâques, retrouvez les méditations proposées par notre frère Sébastien.
Un jour, des gens rapportèrent à Jésus l’affaire des Galiléens
que Pilate avait fait massacrer,
mêlant leur sang à celui des sacrifices qu’ils offraient.
Jésus leur répondit :
Pensez-vous que ces Galiléens
étaient de plus grands pécheurs
que tous les autres Galiléens,
pour avoir subi un tel sort ?
Eh bien, je vous dis : pas du tout !
Mais si vous ne vous convertissez pas,
vous périrez tous de même.
Et ces dix-huit personnes
tuées par la chute de la tour de Siloé,
pensez-vous qu’elles étaient plus coupables
que tous les autres habitants de Jérusalem ?
Eh bien, je vous dis : pas du tout !
Mais si vous ne vous convertissez pas,
vous périrez tous de même.
Jésus disait encore cette parabole :
Quelqu’un avait un figuier planté dans sa vigne.
Il vint chercher du fruit sur ce figuier,
et n’en trouva pas.
Il dit alors à son vigneron :
Voilà trois ans que je viens
chercher du fruit sur ce figuier,
et je n’en trouve pas.
Coupe-le. À quoi bon le laisser épuiser le sol ?
Mais le vigneron lui répondit :
Maître, laisse-le encore cette année,
le temps que je bêche autour
pour y mettre du fumier.
Peut-être donnera-t-il du fruit à l’avenir.
Sinon, tu le couperas.
Luc 13, 1-9
Lorsque je lis ce passage de l’Évangile, je me sens petit, minime, écrasé par l’urgence absolue, pressente de la conversion.
J’ai peur Seigneur.
Je me sens disparaître face à Ton exigence que les hommes me racontent, honteusement.
Moi qui ne sais même pas ce que se convertir signifie.
Oui, je tente bien, faiblement éclairé de l’intérieur de moi.
Je sais que Ta demande de conversion est appel à la vie ; elle n’est pas menace de mort.
Je sais que Ton plan de conversion de l’âme n’est pas un plan d’actions.
Je vais donc devoir avancer avec ce sentiment d’urgence grandissant.
Plus j’avance, plus la route s’allonge,
Plus je prends du temps, plus j’en dispose,
Plus je vis l’urgence, plus Dieu est patient de mon temps court.
Toi seul me convertis.
Je me laisse façonner par Toi, activement.
Tu m’encombres et c’est juste.
Tu veux mes doutes, c’est certain.
Je ne cours plus le risque avec Toi de vivre sans me questionner.
Un petit morceau de conversion, c’est la réalisation toute fugace de Ta présence déréalisée.
Tout le long de ma Vie, éprouver le sursis infini de Dieu qui s’attache à labourer mon cœur.
Se convertir, c’est donc produire ces fruits d’amour, de justice et de pardon, si lents à mûrir pour faire Pâques dans mon cœur.
Maudite tentation de me résoudre à la stérilité de ma vie !
Sauve-moi toujours Seigneur du désabus de moi-même.
Car cette colère me fige. Où que je regarde, les visions d’injustice m’assaillent, la violence me brise, mon enfance me marque au fer rouge de la souffrance.
Je suis révolté Seigneur.
Comment me convertir quand ce feu brûlant me consume, quand l’indignation m’étouffe ?
Ce courroux que rien n’apaise, qui exige la tête de l’autre, sans que jamais elle ne suffise à le calmer.
Aide-moi Seigneur à attiser la flamme de l’Espérance, surtout quand il fait nuit.
Aide-moi Seigneur à convertir mon regard en le réorientant vers le Beau, le Vrai, le Juste ; inlassablement.
Seule sédimentation apaisante de mon emportement que de me déposséder de l’injuste.
Contempler enfin, c’est cela se convertir.
Sébastien,
frère de la Communion Béthanie
Tout au long de ce Carême 2025 et jusqu’à Pâques, retrouvez les méditations proposées par notre frère Sébastien.
En ce temps-là, Jésus prit avec lui Pierre, Jean et Jacques, et il gravit la montagne pour prier.
Pendant qu’il priait, l’aspect de son visage devint autre, et son vêtement devint d’une blancheur éblouissante.
Voici que deux hommes s’entretenaient avec lui : c’étaient Moïse et Élie, apparus dans la gloire.
Ils parlaient de son départ qui allait s’accomplir à Jérusalem.
Pierre et ses compagnons étaient accablés de sommeil ; mais, restant éveillés, ils virent la gloire de Jésus, et les deux hommes à ses côtés.
Ces derniers s’éloignaient de lui, quand Pierre dit à Jésus : Maître, il est bon que nous soyons ici ! Faisons trois tentes : une pour toi, une pour Moïse, et une pour Élie.
Il ne savait pas ce qu’il disait. Pierre n’avait pas fini de parler, qu’une nuée survint et les couvrit de son ombre ; ils furent saisis de frayeur lorsqu’ils y pénétrèrent.
Et, de la nuée, une voix se fit entendre : Celui-ci est mon Fils, celui que j’ai choisi : écoutez-le !
Et pendant que la voix se faisait entendre, il n’y avait plus que Jésus, seul. Les disciples gardèrent le silence et, en ces jours-là, ils ne rapportèrent à personne rien de ce qu’ils avaient vu.
Luc 9, 28b-36
Chères sœurs, chers frères,
En ce deuxième dimanche de Carême, nous méditons la Transfiguration du Christ, notre Seigneur.
Son visage change d’apparence ;
Sa blancheur sidérante est indicible, structurellement autre, tellement étrangère.
Comment ne pas être ébloui par l’infinie magnificence d’une telle manifestation ?
Comment la Transfiguration peut devenir figure d’accomplissement sans nous rendre aveugle ?
Comment contempler à distance la gloire de Dieu manifestée ici en Jésus ?
Quelle est la juste proximité au Divin alors qu’il nous habite déjà tellement ?
Résister de raison à l’hubris d’une comparaison vaine…
Ni Icare, ni Phaéton ; ni Bellérophon, ni Samson.
Les réalités célestes nous écrabouillent souvent, nous petits d’hommes et de femmes ancrés dans notre condition, nos étroitesses, nos bosses et cabosses.
L’infini peut devenir abîme vertigineux, sa proximité si brutale qu’elle en devient insoutenable.
Ne surtout pas mourir alors à nous-mêmes dans notre quête du Divin.
S’approcher de Dieu, ce n’est pas tenter la Transfiguration.
C’est poursuivre la transformation lente, inaccomplie mais qui sauve déjà.
Suivre Dieu, c’est chercher avec ténacité Sa présence sans jamais tenter le face-à-face.
Notre passage ici-bas est une ascension laborieuse et modeste, où le Ciel peut s’approcher sans jamais se laisser atteindre.
Seigneur, aide-nous à marcher à Ta suite sans jamais prétendre T’imiter ;
Aide-nous à Te discerner sans jamais oser Te voir ;
Agis-nous par Ta parole de vie sans tenter Ton imitation.
Transforme-nous, toujours imparfaitement.
Car Ta Résurrection et Ta Gloire doivent nous guider en nous maintenant à distance.
Nous, éternels ignorants de leur mystère profond.
Sébastien,
frère de la Communion Béthanie
Tout au long de ce Carême 2025 et jusqu’à Pâques, retrouvez les méditations proposées par notre frère Sébastien. .
En ce temps-là,
après son baptême,
Jésus, rempli d’Esprit Saint,
quitta les bords du Jourdain ;
dans l’Esprit, il fut conduit à travers le désert
où, pendant quarante jours, il fut tenté par le diable.
Il ne mangea rien durant ces jours-là,
et, quand ce temps fut écoulé,
il eut faim.
Le diable lui dit alors :
Si tu es Fils de Dieu,
ordonne à cette pierre de devenir du pain.
Jésus répondit :
Il est écrit :
L’homme ne vit pas seulement de pain.
Alors le diable l’emmena plus haut,
et lui montra en un instant tous les royaumes de la terre.
Il lui dit :
Je te donnerai tout ce pouvoir,
et la gloire de ces royaumes,
car cela m’a été remis et je le donne à qui je veux.
Toi donc, si tu te prosternes devant moi,
tu auras tout cela.
Jésus lui répondit :
Il est écrit :
C’est devant le Seigneur ton Dieu que tu te prosterneras,
à lui seul tu rendras un culte.
Puis le diable le conduisit à Jérusalem,
il le plaça au sommet du Temple
et lui dit :
Si tu es Fils de Dieu,
d’ici jette-toi en bas ;
car il est écrit :
Il donnera pour toi, à ses anges,
l’ordre de te garder ;
et encore :
Ils te porteront sur leurs mains,
de peur que ton pied ne heurte une pierre.
Jésus lui fit cette réponse :
Il est dit :
Tu ne mettras pas à l’épreuve le Seigneur ton Dieu.
Ayant ainsi épuisé toutes les formes de tentations,
le diable s’éloigna de Jésus jusqu’au moment fixé.
Saint Luc, 4,1-13
En ce temps de Carême, nous sommes invités chères sœurs, chers frères, à entrer au Désert, cette oasis de cœur, ce lieu de ressourcement, cet Eden d’espace d’intimité avec Toi.
Oui Seigneur Jésus, tu as connu ce Désert.
Tu as su y vivre le dépouillement ; tu as su rendre plein ce lieu d’absence ; tu as su y affronter l’Adversaire.
Notre désert à nous n’est parfois pas le Tien.
Nous en traversons un pourtant, aride et malmené par les vicissitudes des hommes,
Un désert mondain qui nous agite, qui accable et nous éloigne de l’autre,
Un désert d’agitation vaine, tenté par la voix du désespoir,
Un désert qui se nourrit de nos craintes, de ces émotions tristes qui nous emportent.
Notre désert à nous, nous isole. Uniforme et plat, il nous assoiffe,
Son horizon sans limites nous enclave,
Nos doutes s’y renforcent, nos insécurités intérieures y deviennent tragiques,
Quand nos souffrances résonnent alors avec celles du Monde.
Le Désert où tu nous invites, Seigneur en ce temps de Carême, transforme le nôtre.
Lieu d’intériorité et de silence,
Lieu d’une solitude habitée par Dieu, reliée à Toi,
Lieu de dialogue avec nous-mêmes en Toi,
Lieu de traversée libre de ta Parole silencieuse qui étanche notre soif.
C’est Le Désert où nos fragilités sont grandes et acclamées, luxuriantes et pleines de sève.
C’est le Désert des Vulnérabilités gracieuses où nous nous confions et nous abandonnons à Toi.
C’est le Désert qui n’est pas repli,
C’est le Désert qui nous abreuve,
C’est le Désert qui fait sens.
Tu nous y guides et tu nous y transformes.
Doux et exigeant compagnonnage, à la manière d’Israël et d’Elie.
Se laisser guider par Toi vers ce Désert, Seigneur, c’est Te faire pleine place, enfin.
Accorde-nous donc Seigneur la grâce d’oser T’y rencontrer,
Déjà en ce tout début de Carême,
Car déjà Pâques germe en nous…
Sébastien,
frère de la Communion Béthanie
Une méditation proposée par notre sœur Valérie.
Ces derniers jours, marchant sur un chemin dans la montagne, j’ai vu une cathédrale dans l’ombre portée d’une souche d’arbre coupé.
Illusion de cathédrale.
Vision pourtant bien réelle, offerte peut-être à mon seul regard ce jour-là.
Poussant la vision un peu plus loin, j’ai imaginé des pèlerins, ceux de l’ombre, ceux de la lumière, gravissant la montagne et convergeant vers cette cathédrale aux allures de forteresse, pour y unir leurs louanges à Dieu.
Il faut je crois, sinon une âme d’enfant, du moins encore assez d’esprit d’enfance, pour voir et prendre au sérieux ce genre de vision éphémère.
« On dirait que… », disions-nous enfants.
Et si, par de simples jeux de regards, de simples élans du cœur, nous nous mettions tous et toutes à bâtir ainsi temples et cathédrales, devenant les bâtisseurs de paix pour le Prince de Paix ?
Le monde n’en serait-il pas plus beau et le Royaume plus proche ?
Valérie,
Sœur de la Communion Béthanie
Une méditation proposée par notre frère Manuel.
Il y avait un artisan. Il aimait beaucoup son travail, et il aimait beaucoup aussi se rendre à l’église dimanche après dimanche. Oui, ce rendez-vous hebdomadaire illuminait toute sa semaine. Ce qu’il aimait lors des offices liturgiques était de chanter, chanter à plein poumon, chanter avec tout son être, et se laisser porter par la musique et les paroles qu’il disait avec les autres. Parfois ses voisins le regardaient avec un air surpris, ou narquois, mais il ne s’en rendait même pas compte, et s’il s’en apercevait, il oubliait aussitôt. Jusqu’à ce qu’il entende un dimanche ces paroles qui furent pour lui comme un couperet :
En effet, en effet, qui chante prie deux fois, mais assurez-vous de bien chanter. Ne châtiez pas les oreilles du Seigneur en chantant faux, car il n’aime que l’harmonie du chant et les voix bien timbrées.
Notre artisan commença à s’inquiéter. Il ne s’était jamais posé la question de s’il chantait bien ou pas, il chantait quand il fallait le faire, point. Mais, et si c’était vrai ? Et si c’était vrai que le Seigneur n’aime que les belles voix et le chant bien chanté ? Il ne savait même pas s’il chantait faux ou pas. Le dimanche suivant il posa la question à ses voisins et voisines : avec plus ou moins de tact ils lui confirmèrent que la qualité de son chant n’était pas à la hauteur de son amour pour la musique. À partir de ce moment l’artisan décida de ne plus chanter, pour ne malmener ni le Seigneur ni ses voisins.
Comme à tout être humain, il arriva à notre artisan qu’il mourut. Il se trouva devant Dieu et ses anges, et il comprit que c’était le moment de son jugement final. Il tomba à genoux devant le trône et implora la miséricorde de Dieu. Et Dieu lui-même lui répondit :
Artisan, ma miséricorde t’est acquise depuis toujours ; tu as mené ta vie comme tu as pu, et je suis fier de toi. En revanche, j’ai une chose à te reprocher : pourquoi m’as-tu privé de ta voix lors des offices les dimanches ? En effet, tu as toujours très mal chanté, mais tu vois, ton chant, quoique imparfait, et l’amour que tu y mettais m’a beaucoup manqué. Maintenant viens, entre dans la joie de ton Seigneur, augmente ma joie avec ta voix et chante, chante tout ce que tu voudras.
Les anges sourirent, invitèrent l’artisan à franchir les portes, et le ciel se remplit de chants et de rires.
Manuel,
frère de la Communion Béthanie
Une méditation proposée par notre sœur Valérie.
Vous avez appris qu’il a été dit : Tu aimeras ton prochain, et tu haïras ton ennemi. Mais moi, je vous dis : Aimez vos ennemis, bénissez ceux qui vous maudissent, faites du bien à ceux qui vous haïssent, et priez pour ceux qui vous maltraitent et qui vous persécutent, afin que vous soyez fils de votre Père qui est dans les cieux ; car il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et il fait pleuvoir sur les justes et sur les injustes. Si vous aimez ceux qui vous aiment, quelle récompense méritez-vous? Les publicains aussi n’agissent-ils pas de même ? Et si vous saluez seulement vos frères, que faites-vous d’extraordinaire ? Les païens aussi n’agissent-ils pas de même ? Soyez donc parfaits, comme votre Père céleste est parfait. Mt 5 : 43-48, Bible Segong.
11 novembre en France, jour férié et de commémoration.
Commémoration : rappeler, célébrer par une cérémonie le souvenir d’une personne, d’un évènement.
De qui se souvenir ?
Des valeureux tombés au combat ? Des victimes, tant civiles que militaires ? De ceux qui ont survécu ?
De quoi se souvenir ?
De la guerre ? De la paix ? De l’entre deux qu’est l’armistice ?
De ce temps où les peuples d’Europe se déchiraient ?
De ce temps que les moins de 110 ans n’ont pu connaître, un temps où notre époque puise ses racines ?
11 novembre, à la mi-temps de l’automne.
Je me souviens que les guerres sont intemporelles, universelles. Où que se porte mon regard, je vois la lutte incessante du bien contre le mal.
Je me souviens d’où je viens, une famille, une histoire. Des guerres ici aussi, beaucoup de bien, un peu de mal.
Je remonte à la source.
Je me souviens que le Messie envoyé à notre humanité n’a levé aucune armée, livré aucune bataille.
Je me souviens que son enseignement tout entier tient dans ce seul commandement, celui d’aimer.
Aimer et se savoir aimé.
Aimer le Seigneur, Notre Dieu, aimer son prochain, quel qu’il soit.
Je me souviens qu’Il a offert Sa Paix.
Croirons-nous un jour assez fort à cet Amour, tous et toutes ensemble, pour que le miracle s’accomplisse, d’un monde, d’une humanité vivant enfin en paix, dans Sa Paix ? La belle fête que ce sera alors, la belle célébration !
Valérie,
sœur de la Communion Béthanie
Une méditation proposée par notre sœur Valérie.
Octobre
Octobre rose. Des rubans accrochés aux revers d’une veste en disent long, bien au-delà des mots, sur des vies de femmes, des destins, la maladie.
Octobre noir. De tristes anniversaires, temps de deuil pour faire mémoire de vies arrachées à leurs proches. Attentat, terrorisme, guerre, chaos.
Octobre aux couleurs d’automne. Les sanglots longs des violons de l’automne blessent mon cœur d’une langueur monotone.
Je suis chrétienne et je vis dans cette réalité-là, celle d’un octobre rose, noir et aux couleurs de l’automne.
Une réalité d’aujourd’hui, partagée avec les hommes et les femmes de notre temps.
Une réalité où se pose, où se dépose, ma prière, la vôtre, la nôtre. Une réalité qui se teinte alors aux couleurs divines de Son Amour, de Sa Paix, de l’Espérance et de la Bonne Nouvelle offerte à qui veut l’entendre.
Rassasie-nous de ton amour Seigneur : nous serons dans la joie.
Apprends-nous la vraie mesure de nos jours : que nos cœurs pénètrent la sagesse.
Reviens, Seigneur, pourquoi tarder ? Ravise-toi par égard pour tes serviteurs.
Rassasie-nous de ton amour au matin, que nous passions nos jours dans la joie et les chants.
Rends-nous en joies tes jours de châtiment et les années où nous connaissions le malheur.
Fais connaître ton œuvre à tes serviteurs et ta splendeur à leurs fils.
Que vienne sur nous la douceur du Seigneur notre Dieu ! Consolide pour nous l’ouvrage de nos mains ; oui, consolide l’ouvrage de nos mains. Ps 89 (90) 12-17
Paix et Bien à chacun, à chacune.
Valérie,
sœur de la Communion Béthanie
Une méditation proposée sélectionnée par notre frère Raphaël.
Jésus dit aux Juifs qui avaient cru en lui : si vous demeurez dans ma parole, vous êtes vraiment mes disciples ; vous connaîtrez la vérité et la vérité vous rendra libre.
Jn, 8,31-32
Ceux, en effet, qui vivent selon la chair s’affectionnent aux choses de la chair, tandis que ceux qui vivent selon l’Esprit s’affectionnent aux choses de l’Esprit. Et l’affection de la chair, c’est la mort, tandis que l’affection de l’Esprit, c’est la vie et la paix.
Rm 8,5-6
Il me semble que tout humain aspire à la vérité. Non pas à sa vérité propre, ni à ce qui lui semble vrai, en comparaison de ce qu’il définit comme faux. Mais à la vérité dont nous parle Jésus.
Le monde dans lequel nous vivons n’est pas mauvais en soi. Mais il propose à l’humain que nous sommes, beaucoup d’éléments pour nourrir « la chair ». « Sarx » en grec, c’est la chair, le corps, mais plus globalement, la condition de créature. C’est-à-dire, pour ce qui concerne l’humain, sa personne, son être, son individualité, ses besoins… son « je ».
La chair n’est donc pas mauvaise en soi non plus. Elle caractérise le penchant naturel de l’humain vers tout ce qui peut combler ses désirs légitimes (sécurité, confort, bien-être…).
Mais la Parole, qui s’est faite chair en Jésus, nous emmène plus loin. Elle nous appelle à ne pas nous laisser enfermer dans notre chair. Un attachement excessif aux besoins du « je » est mortifère. C’est pourquoi « l’affection de la chair, c’est la mort ». La Parole, en revanche, est vie et nous invite à dépasser le « je » (non à le nier), pour nous tourner vers plus grand, vers un « tu » potentiel. C’est là l’œuvre de l’Esprit.
Jésus nous invite à garder sa parole et même à « demeurer » en elle, à y vivre, à y puiser nos forces quotidiennement. C’est, pour le disciple, la seule façon de connaître la véritable liberté, qui ne consiste ni en la négation de notre condition humaine, ni à un enfermement dans celle-ci, mais au dépassement de notre vision trop étroite du monde et de la vie.
La vérité participe du vivant, elle appartient à la chair. Toujours exposée, toujours nue, elle est toujours établie dans une rencontre et en relation avec un autre (…) C’est purement dans un lien délié entre deux êtres que la liberté et la vérité prennent sens (…).
Jean-Pierre Brice Olivier, Oser la chair, Éditions du Cerf, Paris, 2014.
Raphaël,
frère de la Communion Béthanie
Une méditation proposée par notre frère prieur.
Ma terre de fond est notre Communion Béthanie.
Au quotidien, mon métier est d’être adjoint en pastorale scolaire.
J’ose dire que ces deux réalités se nourrissent l’une l’autre.
Une fois n’est pas coutume.
Je vous partage, ci-dessous, mon mot d’accueil pour le temps d’intériorité de notre journée de pré-rentrée.
Un signe, modeste mais bien réel, de la fécondité de notre petite famille spirituelle.
« Une des particularités d’un établissement catholique d’enseignement, c’est cette petite lampe qui brûle, en son sein, nuit et jour, dans une pièce nommée chapelle.
Notre lycée n’échappe pas à cette particularité.
Que signifie cette lampe ?
Pour les chrétiens catholiques, elle exprime la réelle présence du Christ-Jésus, dans le pain consacré lors de la Messe.
A l’origine, cette réserve eucharistique était là pour apporter la communion aux personnes absentes des assemblées, personnes âgées, malades, portant un handicap…
Peu à peu, cette réserve eucharistique est devenue un appel à l’adoration.
Cette réserve est conservée dans une boîte appelée tabernacle.
Etymologiquement, le tabernacle est la tente de la rencontre.
Dans une école catholique, une des missions premières du chef d’établissement et de son adjoint en pastorale, c’est de garder ce tabernacle.
Ainsi, pouvons-nous comprendre, qu’au-delà de nos croyances religieuses ou pas, cette petite lampe signifie la veille sur notre qualité de rencontre.
Je vous invite à la méditation :
Quelle est, aujourd’hui, ma qualité de rencontre avec moi-même, au plus intime de mon cœur ?
Quel désir, me propulse, au seuil de cette année scolaire nouvelle, pour me déconnecter et m’ouvrir à d’autres connexions ?
Quel est mon appel à veiller sur ma qualité de rencontre avec les autres, avec tous les autres ?
Pour les chrétiennes, les chrétiens, pour les croyants d’autres religions, pour tous les chercheurs de sens parmi nous, regardons, s’il vous plaît, quelques instants, cette lampe,
Elle est le signe et le signal que Dieu est venu nous rejoindre au fond de nos abîmes.
Il nous rejoint, là où personne d’autre ne peut nous rejoindre.
Il nous accompagne, là où personne d’autre ne peut marcher avec nous.
Il nous accepte là où nous ne nous acceptons pas.
Il nous déplace vers les autres, en dehors de nos cercles parfois fermés.
Il, quel que soit le nom que nous lui donnons ou pas, ouvre toujours à la rencontre. »
Sereine rentrée, scolaire, universitaire, sereine rentrée tout court !, à vous toutes et tous,
Jean-Michel+,
votre frère prieur de la Communion Béthanie