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Archive de l’étiquette Pierre

Noël 2024

Une méditation proposée par notre frère Pierre.

Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière ; et sur les habitants de l’ombre, une lumière a resplendi.

Livre du prophète Isaïe 9,1

Aujourd’hui, nous sommes appelés à nous convertir à cet incroyable bouleversement qui nous révèle que participer à la grandeur de Dieu, c’est refuser de faire place en nos cœurs à toute pulsion de domination. Car tant que le moindre rêve de (toute-) puissance hantera notre cœur, nous courrons le risque de prêter nos forces à la violence et de tourner le dos à Dieu que nous voulons pourtant servir (…)
Marie-Caroline Bustarret, théologienne, Faculté Loyola – Paris.

A chaque jour suffit sa peine. Il faut faire ce que l’on a à faire, et pour le reste, se garder de se laisser contaminer par les innombrables petites angoisses, les mille petits soucis qui sont autant de motions de censure vis-à-vis de Dieu. Notre unique obligation morale, c’est de défricher en nous-mêmes de vastes clairières de paix et de les étendre de proche en proche, jusqu’à ce que cette paix irradie vers les autres. Et plus il y a de paix dans les êtres, plus il y en aura aussi dans ce monde en ébullition.
Etty Hillesum, le 29 septembre 1942.

Voici que se termine cette série de méditations qui m’aura donné l’occasion de revenir au message d’Etty Hillesum, jeune femme juive issue du même peuple que Jésus de Nazareth dont nous fêtons en ce moment la naissance. Peut-être connaissiez-vous déjà « Une vie bouleversée » qui résume son journal et dont j’ai aimé vous partager quelques fragments ? Je me suis concentré sur ses écrits spirituels, laissant de côté ce qui constitue sa vie affective et familiale ainsi que sa lecture politique de l’actualité de son époque. Pourtant, c’est sa riche humanité qui me la rend si proche. Sa curiosité insatiable, sa forte affectivité, son absence de préjugés et son franc-parler ne cessent de m’impressionner par leur authenticité.

Avec Etty Hillesum, heureux Noël à chacune et chacun d’entre vous !

Pierre,
frère de la Communion Béthanie

4e dimanche de l’Avent 2024

Une méditation sélectionnée par notre frère Pierre.

D’où m’est-il donné que la mère de mon Seigneur vienne jusqu’à moi ? Luc 1, 43

Toi qui m’a tant enrichie, mon Dieu, permets-moi aussi de donner à pleines mains. Ma vie s’est muée en un dialogue ininterrompu avec toi, mon Dieu, un long dialogue. Quand je me tiens dans un coin du camp, les pieds plantés dans la terre, les yeux levés vers ton ciel, j’ai parfois le visage inondé de larmes – unique exutoire de mon émotion intérieure et de ma gratitude. Le soir aussi, lorsque couchée dans mon lit, je me recueille en Toi, mon Dieu, des larmes de gratitude m’inonde parfois le visage et c’est cela, ma prière à moi.
Je suis très fatiguée depuis quelques jours mais cela passera comme le reste : tout progresse selon un rythme profond propre à chacun de nous et l’on devrait apprendre aux gens à écouter et respecter ce rythme ; c’est ce qu’un être humain peut apprendre de plus important en cette vie.
Je ne lutte pas avec Toi, mon Dieu, ma vie n’est qu’un long dialogue avec Toi. Il se peut que je ne devienne jamais la grande artiste que je voudrais être, car je suis trop bien abritée en Toi mon Dieu. Je voudrais parfois tracer à la pointe sèche de petits aphorismes et de petites histoires vibrantes d’émotion, mais le premier mot qui me vient à l’esprit, toujours le même, c’est : Dieu, et il contient tout et rend tout le reste inutile. Et toute mon énergie créatrice se convertit en dialogues intérieurs avec Toi ; la houle de mon cœur s’est faite plus large depuis que je suis ici, plus animée et plus paisible à la fois, et j’ai le sentiment que ma richesse intérieure s’accroît sans cesse.
18 août 1943, Les écrits d’Etty Hillesum, Journaux et lettres 1941-1943 (page 897).

C’est la toute dernière lettre d’Etty, écrite quelques jours avant son départ pour Auschwitz le 6 septembre 1943 (elle disparaîtra trois mois plus tard). Consciente du destin qui l’attend, Etty s’attache à regarder toujours plus loin et plus large pour voir ce qui pourrait advenir de beau. Elle demande à Dieu « de la prendre par la main » et s’engage « à le suivre bravement et sans beaucoup de résistance ». Etty se dispose ainsi à accueillir au mieux celles et ceux qu’elle rencontre, vivant au plus près le « sacrement du frère » qui donne sens à l’existence. Le jour de son départ en déportation, un de ses amis écrit : « Nous éprouvons un sentiment de perte, mais nous ne nous sentons pas les mains vides. Une amitié comme la sienne ne se perd pas ». Tout est dit.

Pierre,
frère de la Communion Béthanie

3e dimanche de l’Avent 2024

Une méditation sélectionnée par notre frère Pierre.

Je vais t’aider, mon Dieu

Frères, soyez toujours dans la joie du Seigneur ; je le redis : soyez dans la joie. Que votre bienveillance soit connue de tous les hommes. Le Seigneur est proche. Ne soyez inquiets de rien, mais en toute circonstance, priez et suppliez, tout en rendant grâce, pour faire connaître à Dieu vos demandes. Et la paix de Dieu, qui dépasse tout ce qu’on peut concevoir, gardera vos cœurs et vos pensées dans le Christ Jésus.
De l’apôtre Paul aux Philippiens 4, 4-7

C’est sans doute la plus belle (en tout cas la plus célèbre) prière d’Etty Hillesum, une prière bien dans la tradition juive. « Du Dieu de l’intériorité » au Dieu « incapable de modifier le cours des choses », non plus un Dieu que nous sollicitons pour quémander de l’aide mais un Dieu que nous pouvons aider. Pourquoi ? Afin de ne pas le laisser mourir en nous, ce qui révèle la grande crainte d’Etty. Elle liait étroitement relation à Dieu et amour du prochain. Sa préoccupation fait écho à cette parole attribuée à Thérèse d’Avila « Christ n’a pas de mains. Il n’a que nos mains pour faire son travail aujourd’hui ».

Je vais t’aider, mon Dieu, à ne pas t’éteindre en moi, mais je ne puis rien garantir d’avance. Une chose cependant m’apparaît de plus en plus claire : ce n’est pas toi qui peux nous aider, mais nous qui pouvons t’aider – et, ce faisant, nous nous aidons nous-mêmes. C’est tout ce qu’il nous est possible de sauver en cette époque et c’est aussi la seule chose qui compte : un peu de toi en nous, mon Dieu. Peut-être pourrons-nous aussi contribuer à te mettre au jour dans les cœurs martyrisés des autres. Oui, mon Dieu, tu sembles peu capable de modifier une situation finalement indissociable de cette vie. Je ne t’en demande pas compte, c’est à toi au contraire de nous appeler à rendre des comptes, un jour. Il m’apparaît de plus en plus clairement, presque à chaque pulsation de mon cœur, que tu ne peux pas nous aider, mais que c’est à nous de t’aider et de défendre jusqu’au bout la demeure qui t’abrite en nous.
Etty HILLESUM, 12 juillet 1943.

Pierre,
frère de la Communion Béthanie

2e dimanche de l’Avent 2024

Une méditation sélectionnée par notre frère Pierre.

Paume 125 (126)

Quand le Seigneur ramena les captifs à Sion,
nous étions comme en rêve !
Alors notre bouche était pleine de rire,
nous poussions des cris de joie.

Alors on disait parmi les nations :
« Quelles merveilles fait pour eux le Seigneur ! »
Quelles merveilles le Seigneur fit pour nous :
nous étions en grande fête !

Ramène, Seigneur nos captifs,
comme les torrents au désert.
Qui sème dans les larmes
moissonne dans la joie.

Il s’en va, il s’en vient en pleurant,
il jette la semence ;
il s’en vient, il s’en vient dans la joie,
il rapporte les gerbes.

Il y a en moi un puits très profond. Et dans ce puits, il y a Dieu. Parfois, je parviens à l’atteindre. Mais plus souvent, des pierres et des gravats obstruent ce puits, et Dieu est enseveli. Alors il faut le remettre au jour. Il y a des gens, je suppose, qui prient les yeux levés vers le ciel. Ceux-là cherchent Dieu en dehors d’eux. Il en est d’autres qui penchent la tête et la cachent dans leurs mains, je pense que ceux-ci cherchent Dieu en eux-mêmes. (26 août 1941)

(…) Et je te remercie de m’avoir donné le don de lire dans le cœur des autres. Les gens sont parfois pour moi des maisons aux portes ouvertes. J’entre, j’erre à travers des couloirs, des pièces : dans chaque maison, l’aménagement est un peu différent, pourtant elles sont toutes semblables et l’on devrait pouvoir faire de chacune d’elles un sanctuaire pour toi, mon Dieu. Et je te le promets, je te le promets mon Dieu, je te chercherai un logement et un toit dans le plus grand nombre de maisons possible. C’est une image amusante : je me mets en route pour te chercher un toit. Il y a tant de maisons inhabitées où je t’introduirai comme invité d’honneur. Etty HILLESUM, in Une vie bouleversée (page 208).

Pierre,
frère de la Communion Béthanie

1er dimanche de l’Avent 2024

Méditation pour le temps de l’Avent proposée par Pierre, frère de la Communion Béthanie.

En ces jours-là, en ce temps-là, je ferai germer pour David un germe de justice qui exercera droit et justice dans le pays. En ces jours-là, Juda sera sauvé et Jérusalem habitera en sécurité. Voici le nom dont on appellera la Ville : « Yahvé-notre-Justice. » Jérémie 33, 15-16

En ces temps de grandes incertitudes teintées d’inquiétude sourde (réchauffement climatique, multiplication des régimes autoritaires, guerres en Ukraine et au Proche-Orient, montée des intolérances, violence des relations sociales, difficultés économiques…), la petite fille espérance comme disait Charles Péguy paraît si fragile et pourtant si nécessaire dans l’attente du Messie. Il peut sembler naïf d’espérer envers et contre tout et pourtant une jeune femme, Etty Hillesum, nous propose une voie possible. Hollandaise, juive, agnostique, aimant la vie, elle entreprendra un chemin spirituel bouleversant qui l’autorisera à affirmer, malgré les horreurs nazies, que « la vie est belle et pleine de sens ». Arrêtée, puis internée et enfin déportée à Auschwitz, elle sera gazée à l’âge de 29 ans.

Je crois que je vais le faire : tous les matins, avant de me mettre au travail, me « tourner vers l’intérieur », rester une demi-heure à l’écoute de moi-même. « Rentrer en moi-même. » Je pourrais dire aussi : méditer. Mais le mot m’horripile encore un peu. Oui, pourquoi pas: une demi-heure de paix en soi-même. On agite bien bras, jambes et autres muscles le matin dans la salle de bains; mais cela ne suffit pas. L’être humain est corps et esprit. Une demi-heure de gymnastique et une demi-heure de « méditation » peuvent fournir une bonne base de concentration pour toute une journée. Mais une « heure de paix », ce n’est pas si simple. Cela s’apprend.

Hineinhorchein, « écouter au-dedans », je voudrais disposer d’un verbe bien hollandais pour dire la même chose. De fait, ma vie n’est qu’une perpétuelle écoute « au-dedans», de moi-même, des autres, de Dieu. Et quand je dis que j’écoute « au-dedans », en réalité c’est plutôt Dieu en moi qui est à l’écoute. Ce qu’il y a de plus essentiel et de plus profond écoute l’essence et la profondeur de l’autre. Dieu écoute Dieu. Etty HILLESUM, in Une vie bouleversée (page 35, 207-208)

Pierre,
frère de la Communion Béthanie

Dimanche de Pâques 2023

Tout au long de ce Carême 2023 et jusqu’à Pâques, retrouvez les méditations proposées par notre frère Olivier de Reconnaissance, association qui réunit des chrétiens engagés dans l’Église catholique, parents de personnes homosexuelles, qui témoigne de l’accueil de l’homosexualité au sein des « églises domestiques » que sont nos familles.

« Que toute la terre soit baignée de la joie douce et respectueuse de Pâques »
Jean 20,1-9

Le premier jour de la semaine, Marie Madeleine se rend au tombeau de grand matin ; c’était encore les ténèbres. Elle s’aperçoit que la pierre a été enlevée du tombeau. Elle court donc trouver Simon-Pierre et l’autre disciple, celui que Jésus aimait, et elle leur dit : « On a enlevé le Seigneur de son tombeau, et nous ne savons pas où on l’a déposé. »
Pierre partit donc avec l’autre disciple pour se rendre au tombeau. Ils couraient tous les deux ensemble, mais l’autre disciple courut plus vite que Pierre et arriva le premier au tombeau. En se penchant, il s’aperçoit que les linges sont posés à plat ; cependant il n’entre pas. Simon-Pierre, qui le suivait, arrive à son tour. Il entre dans le tombeau ; il aperçoit les linges, posés à plat, ainsi que le suaire qui avait entouré la tête de Jésus, non pas posé avec les linges, mais roulé à part à sa place. C’est alors qu’entra l’autre disciple, lui qui était arrivé le premier au tombeau. Il vit, et il crut. Jusque-là, en effet, les disciples n’avaient pas compris que, selon l’Écriture, il fallait que Jésus ressuscite d’entre les morts.

Nous avons cheminé dans ce carême, éclairés par des textes qui, s’y l’on y-ajoute les béatitudes, sont une source d’où jaillit la confiance à laquelle le Christ nous appelle.

Et voici l’aboutissement de cette humble et solide confiance : la pierre est roulée, le tombeau est vide, l’étonnement puis la joie et l’émerveillement sont au rendez-vous de la recherche de Marie et Marie-Madeleine puis de Pierre et de Jean.

L’enthousiasme grandit, la bonne nouvelle est partagée, elle ne concerne plus seulement chacun dans son for intérieur, elle s’adresse à l’univers entier.

Nous tous, LGBTQIA+, hétéros, toute la création, sommes appelés à renaître, à vivre par Lui, avec Lui et en Lui.

Olivier
de Reconnaissance.



Message personnel d’Olivier
Au moment de vous dire au revoir, je vous partage ma joie profonde de prier et méditer avec vous qui êtes membres ou sympathisant·Es de la Communauté Béthanie.
Mon fils, par son état de vie différent du mien, m’a « appris la vie », il m’a fait renaître à une confiance plus grande encore dans l’Amour et dans mon Créateur. Je lui en suis reconnaissant.


Photo : mosaïque de sœur Samuelle, ermite et amie de notre Communion Béthanie
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