Une méditation proposée par notre frère Raphaël.
Comment pouvons-nous ne pas aimer le monde si ce monde est un don que le Père a fait au Fils et qu’il a créé pour Lui, le Lui remettant, et le Lui destinant ? Comment pouvons-nous ne pas aimer le monde, si Dieu lui-même l’a aimé au point de lui donner son Fils bien-aimé ?
Comment pouvons-nous ne pas aimer le monde, si ce monde est la matière par laquelle nous devons construire le Royaume de Dieu ?
Les anciens auteurs chrétiens disaient : « En Dieu il y a un abîme de paternité », car le Père regarde toujours miséricordieusement notre monde avec toutes ses peines, ses péchés et sa perdition et donne son fils premier-né afin que le monde soit sauvé et renouvelé.
Le regard du père doit devenir notre regard sur le monde et sur ce qui s’y passe, même le mal, « car le Dieu Tout-Puissant (…), puisqu’il est souverainement bon, ne laisserait jamais un mal quelconque exister dans ses œuvres s’il n’était assez puissant et bon pour faire sortir le bien du mal lui-même. » Saint Augustin.
« Nous savons d’autre part que tout concourt au bien de ceux qui aiment Dieu. » Rm 8,28
Donc, dans le monde, pour un cœur qui aime Dieu, rien ne s’oppose à Lui, si ce n’est le péché, commis et poursuivi consciemment en tant qu’objectif.
Lorsque quelqu’un décide délibérément de faire le mal, il se place contre Dieu et contre le monde. Il n’y a rien dans le monde qui soit un obstacle à notre rapport avec Dieu, si ce n’est le mal volontairement accompli. Et même ce mal – une fois commis – devient pour Dieu l’occasion d’en tirer du bien.
Un chrétien sait que le mal existe, mais il ne se laisse jamais arrêté par lui.
Prier dans le monde de Antonio-Maria Sicardi, o.c.d.
hors-série Vives Flammes, Éditions du Carmel, 2015.
Une méditation proposée par notre sœur Élisabeth.
« Se dire prêt à aimer beaucoup de gens tout en refusant de les aimer tous, montre qu’on n’a pas compris de quelle nature est cet amour dont Jésus parle.
L’amour proposé par l’Évangile est sûrement exigeant mais se réalise toujours au niveau où chacun se trouve et non pas comme un idéal qu’on généralise. Chaque être humain porte une aspiration à l’amour. Quelles que soient ses capacités, quelle que soit son histoire, au fond de son être se trouve inscrite une conscience de l’amour. Même celui qui est égaré garde en lui une attente, le désir de rencontrer le véritable amour et de pouvoir aimer. »
Extrait d’une méditation de frère François de la Communauté de Taizé.
Père, aide-nous, s’il te plaît, à vivre et à donner cet amour véritable.
Donne-nous, Seigneur, un cœur nouveau,
Mets en nous, Seigneur, un esprit nouveau.
Élisabeth
Une méditation proposée par notre sœur Céline.
L’insensé de l’amour
On pourra dire ce qu’on veut,
l’amour n’a pas de sens…
Venir à ce monde (non pas naître)
tout en attendre
pour croître (non pas grandir)
pour entrevoir l’Autre (non pas rencontrer).
On pourra dire ce qu’on veut,
l’amour n’a pas de sens…
Embrasser un·e autre, une carrière,
tout en attendre
pour croître (non pas grandir)
pour entrevoir la vie (non pas la comprendre).
On pourra dire ce qu’on veut,
l’amour n’a pas de sens…
Être accueilli·e un jour,
sans étiquette ni case à remplir,
sans passeport ni certificat d’origine,
au delà des limites acceptées
au delà des images froissées.
Juste pour être.
On dira ce qu’on veut,
l’amour n’a de sens que lorsqu’il est inconditionnel.
Céline
Le premier lundi de chaque mois, nous entrons dans la poésie de notre frère Philippe.
19
Étonne-toi chaque jour
d’être encore là, vivant…
N’oublie pas les heures de plénitude
lumineuse et paisible,
que les mots ne pouvaient traduire…
Trésor encore intact aujourd’hui,
Respiration de l’infini
au creux de ton corps…
Mais ne relâche pas ta vigilance :
faible et fragile comme tu es,
c’est toujours le moment d’échapper à la peur,
à l’engourdissement,
à l’étroitesse de tes pensées…
C’est toujours le moment
d’accueillir un Secours et de remercier…
Il y a toujours à redescendre
tout au fond de toi-même
à la rencontre du Mystère…
C’est Lui qui, chaque fois,
renouvelle la confiance,
ton regard sur ta vie, sur le monde…
Lui qui réveille en toi la joie d’aimer…
Philippe
Une méditation proposée par notre frère Raphaël.
Dire d’un homme qu’il est Dieu n’a pas en soi grand intérêt.
Il en va différemment lorsque nous confessons que l’homme qui est Dieu est un homme crucifié. Nous avons à confesser et penser Dieu à partir du Crucifié. On peut essayer de dédouaner Dieu de la souffrance de Jésus en faisant de l’humanité de Jésus le seul lieu de sa souffrance, en empêchant que cette question ne déborde ce cadre. Mais nous pouvons aller plus loin : penser que la souffrance de Jésus affecte, change, bouleverse ce que nous savons de la réalité même de Dieu. En Jésus, c’est Dieu lui-même qui est engagé dans la souffrance. La Croix ne nous contraint-elle pas à changer notre représentation de Dieu ?
Au cours des premiers siècles de l’histoire de l’Église, plusieurs croyants ont estimé que Jésus ne pouvait pas être Dieu égal au Père. Cette thèse pouvait être soutenue à partir des limites dont témoigne la vie historique de Jésus : celui-ci ignore, par exemple, le jour du Jugement, Jésus se fatigue, Jésus connaît l’angoisse. Tous ces aspects de la vie du Christ sont jugés incompatibles avec l’affirmation de sa divinité. La foi de l’Église n’a pas retenu ce point de vue. Ce qui est en jeu dans ce débat est plus la nature de Dieu que l’humanité de Jésus. Lorsqu’on dit de Dieu qu’il est infini, incommensurable, immuable, sans commencement ni origine, etc., on comprend ces affirmations de telle sorte que Dieu ne peut pas entrer dans nos limites humaines.
Or, pour la foi chrétienne, être limité, souffrant, affecté par l’ignorance et l’angoisse, tous ces modes humains d’exister n’ont pas été jugés incompatibles avec le fait d’être Dieu puisque nous confessons de Jésus qu’il est Dieu Fils de Dieu. Autrement dit, il ne faut pas partir de notre idée de Dieu, qu’elle soit philosophique ou même issue de l’Ancien Testament, pour déclarer que Jésus est Dieu, Fils de Dieu, mais il nous faut réinventer notre idée de Dieu à partir de l’humanité de Jésus, et donc aussi de l’humanité crucifiée de Jésus. Il nous faut perpétuellement remettre en cause nos représentations de Dieu à partir de Jésus. Dieu doit toujours rester pour nous en chantier.
Alain Durand
in Dieu choisit le dernier
Éditions du Cerf, 2010.
Une méditation proposée par notre sœur Loan.
Toute histoire humaine commence bien par : Il était une Foi(s)…
Ne dit-on pas que la Foi Véritable soulève et transporte les montagnes ?
Alors j’imagine que la mauvaise foi fait facilement une montagne d’un trou de souris.
Combien de fois Seigneur j’ai douté de toi, moult fois, et à force de redouter cela finissait par devenir redoutable.
Combien de fois Seigneur j’ai cru que tu m’avais abandonnée, alors que c’est en m’abandonnant dans tes bras que j’ai retrouvé l’abondance de la VIE.
Combien de fois Seigneur j’ai cru que tu ne m’entendais pas alors que c’était moi qui n’étais pas à l’écoute de ta parole.
Combien de fois Seigneur j’ai laissé mes cinq sens (ouïe, vue, odorat, toucher, goût) s’altérer en raison de mon sixième sens qui est mon état d’esprit déplorable quand je me juge et juge mon prochain… plutôt que de méditer ta parole : « Ne jugez point, afin que vous ne soyez point jugés » Matthieu 7, 1.
C’est pourtant bien toi qui nous a donné la Foi et aimés le premier.
Béni sois-tu pour ta Patience infinie envers notre humanité si pauvre parfois.
Loué sois-tu pour ta Miséricorde face à nos tribulations dans le monde.
Je te rends grâce pour un jour à la fois, pour ce bonheur d’avoir réveillé mon âme d’enfant qui se réjouit de vivre en ton Amour infiniment bon.
Je t’aime Jésus le Christ.
Sororellement et fraternellement.
Je vous embrasse chaleureusement,
votre sœur Loan.
photo Zorka Hereford
Une méditation proposée par notre sœur Marie-Agnès.
Je te loue, Seigneur, de n’avoir jamais donné de justification
au mal mais d’avoir, en lieu et place de tout discours, exposé
tes entrailles à la souffrance humaine
Je te loue, toi le Dieu incarné, de t’être affranchi des prisons
de nos théologies pour venir vivre
dans les limites que pose un corps, le vertige de l’insécurité
Je te loue, toi le Dieu d’ici et de maintenant,
de supporter la déchirure de la vraie compassion de laisser
à nos douleurs l’espace pour s’exprimer
sans nous pousser pour ton confort,
dans les bras d’une consolation préfabriquée
Je te loue, toi le Dieu de la délicatesse, d’avoir pour nos blessures
le respect d’un blessé
et d’ouvrir, dans le même temps, le cercueil
des jours où nous voulons nous enfermer.
Marion Muller Colard
En cette rentrée, nous reprenons notre cheminement méditatif avec les propositions de nos frères et sœurs. Le premier lundi de chaque mois, nous entrons dans la poésie de notre frère Philippe.
18
De nouveau angoissé, désespéré ?
C’est la Vie en toi, le Grand Vivant
qui crie pour que tu Le délivres,
Et tu L’as oublié !
Écoute-Le te murmurer :
« S’il te plaît, aie pitié de Moi,
demande vite de l’aide !
Ne Me laisse pas longtemps dans cet état,
ce désert sans chemin…
Si tu ne veux pour toi,
fais-le pour Moi…
Je ne veux pas mourir !
Ma soif est grande
quand tu laisses ta fatigue
et la peur t’envahir…
Il y a de l’eau sous le sable
pour nous désaltérer,
nous réjouir et nous rassurer…
Alors ne te lasse pas de creuser !
Fais-le pour Moi qui t’ai créé
et porté jusqu’ici dans Mes bras… »
Philippe
Une méditation estivale proposée par notre sœur Marie-Agnès.
Il y eut
un Unique,
pour que tous
soient visités,
chacun dans son lieu,
en son plein milieu,
là où se croisent
la chair et le nom.
C’est toujours
par le singulier
que s’annonce
l’éternité.
Déchiffrer
ce visage
pour la lumière
qu’il porte :
notre humanité
enfin née
de consentir
aux mains du potier.
Nous sommes
poussières de terre,
mais enfants
d’un seul Père
et voués à une illimitée
fraternité
par l’Amour
qui a tout donné.
Francine Carrillo
Vers l’inépuisable, 52 traversées pour 52 semaines
Éditions Labor et Fides
Photo de Oumaima Dadaoua.
Une méditation estivale proposée par notre sœur Marie-Agnès.
Nous ne sommes plus
simplement seuls,
pliés sur nos colères
ou nos rancunes.
Mais reliés
à plus large
que nous :
un appel à être,
un appel de l’être,
qui est, qui était
et qui vient.
Survient alors
ce que nous n’avions pas
entendu,
une passerelle jetée
vers une autre profondeur,
vers un juste bonheur,
si nous osions
nous risquer
sur l’autre versant
de nos peurs.
C’est sur le sable du non-savoir
dans l’absolue nudité du croire,
que se tient la Présence
qui délivre de l’errance.
Il suffirait d’un rien
pour goûter à cet éblouissement.
Francine Carrillo
Vers l’inépuisable, 52 traversées pour 52 semaines
Éditions Labor et Fides
Une méditation estivale proposée par notre sœur Marie-Agnès.
On s’en prend à Dieu
pour son silence,
son absence, son indifférence.
Pourquoi ce monde
si boiteux
et tant d’humains
malheureux ?
Pourquoi
cette impuissance
du Tout-Puissant ?
La question
est si ancienne
qu’elle en devient
sempiternelle.
On gagnerait
à la quitter
en s’ouvrant
à une autre démesure.
L’étonnement peut
avoir lieu aux marges
d’une conversation
ou d’une lecture.
Il arrive qu’on soit
emmené
par la justesse d’une pensée
ou la caresse d’une mélodie
qui soudain nous délivre
de nos rigidités
et nous ouvre
à une neuve porosité.
Francine Carrillo
Vers l’inépuisable, 52 traversées pour 52 semaines
Éditions Labor et Fides
Une méditation estivale proposée par notre sœur Marie-Agnès.
On se construit
en se cognant,
à des parents,
à des lois,
à des événements.
Apprendre
à ne pas esquiver
ce combat.
Nous y sommes
de toute façon envoyés
par la voix embuissonnée
dans les épines.
Celle qui a foi
en nous
jusqu’à faire taire
nos frilosités
quand il s’agit
de débusquer
la violence
dont nous sommes traversés.
On voudrait parfois
que l’appel se détourne
et nous rende
à la tranquillité d’être.
Mais la voix est là
qui fait corps
avec notre glaise.
On ne l’esquive pas
impunément
car c’est elle
qui veille sur notre liberté.
Francine Carrillo
Vers l’inépuisable, 52 traversées pour 52 semaines
Éditions Labor et Fides
Photo pxhere.com.